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Hélas ! Fortunio ne prouve rien, — si ce n’est qu’il vaut mieux être riche que pauvre, quoi qu’en puissent dire M. Casimir Bonjour et tous les poètes qui font des antithèses sur les charmes de la médiocrité.

Fortunio est un hymne à la beauté, à la richesse, au bonheur, les trois seules divinités que nous reconnaissions. — On y célèbre l’or, le marbre et la pourpre. Du reste, nous en prévenons les femmes de chambre sensibles, l’on y trouve peu de doléances sur les âmes dépareillées, la perte des illusions, les mélancolies du cœur et autres platitudes prétentieuses qui, reproduites à satiété, énervent et amollissent la jeunesse d’aujourd’hui. — Il est temps d’en finir avec les maladies littéraires. Le règne des phtisiques est passé. — Le spiritualisme est une belle chose sans doute ; mais nous dirons avec le bonhomme Chrysale, dont nous estimons fort la bourgeoise raison :

Guenille si l’on veut ; ma guenille m’est chère.

Beaucoup de gens pourront crier à l’invraisemblance et à l’impossibilité ; mais ces gens-là courront le risque de se tromper souvent : le roman de Fortunio est beaucoup plus vrai que bien des histoires. — Si quelques magnificences semblent exorbitantes et fabuleuses aux esprits économes de l’époque, nous pourrions au besoin désigner les endroits, et le masque qui couvre la figure des