Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/323

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mousquetaires et deux petits collets en échange du miraculeux bichon.

Pendant qu’elle rêve, jetons un coup d’œil dans sa chambre à coucher, d’autant que cette occasion de décrire la chambre à coucher d’une jolie femme du temps ne se présentera pas de sitôt, et que le Pompadour est aujourd’hui à la mode.

Le lit de bois sculpté, peint en blanc, rehaussé d’or mat et d’or bruni, pose sur quatre pieds tournés avec un soin curieux. Les dossiers, de forme cintrée, surmontés d’un groupe de colombes qui se becquètent, sont rembourrés moelleusement pour éviter que la jolie dormeuse ne se frappe la tête en faisant quelque rêve un peu vif où l’illusion approche de la réalité. Un ciel, orné de quatre grands bouquets de plumes et fixé au plafond par un câble doré, soutient une double paire de rideaux d’une étoffe couleur cuisse de nymphe moirée d’argent. Dans le fond, il y a une grande glace à trumeau festonné de roses et de marguerites mignonnement découpées ; cette glace réfléchit les attitudes gracieuses de la comtesse, fait d’utiles trahisons à ses charmes en montrant ce qu’on ne doit pas laisser voir. En outre, elle égaye et donne de l’air et du jour à ce coin un peu sombre. Éliante est tournée de façon à n’avoir pas besoin de s’entourer des prudences du mystère ; elle n’a que faire du demi-jour et des teintes ménagées.