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vrants parfums, aspirant à pleines narines jusqu’à sentir son cœur se fondre et ses yeux s’alanguir. Quand elle se redressa, ses joues scintillaient tout emperlées de gouttelettes, et son petit nez charmant, barbouillé le plus gentiment du monde par la poussière d’or des étamines, était d’un très beau jaune. Elle s’essuya en riant, se recoucha et se rendormit ; vous pensez bien qu’elle vit passer Tiburce dans tous ses rêves.

Dans tout ceci qu’est devenue la Madeleine de la Desccente de croix ? Elle règne toujours sans rivale au cœur de notre jeune enthousiaste ; elle a sur les plus belles femmes vivantes l’avantage d’être impassible : — avec elle point de déception, point de satiété ! elle ne désenchante pas par des phrases vulgaires ou ridicules ; elle est là immobile, gardant religieusement la ligne souveraine dans laquelle l’a renfermée le grand maître, sûre d’être éternellement belle et racontant au monde, dans son langage silencieux, le rêve d’un sublime génie.

La petite ouvrière de la rue Kipdorp est vraiment une charmante créature ; mais comme ses bras sont loin d’avoir ce contour onduleux et souple, cette puissante énergie enveloppée de grâce ! Comme ses épaules ont encore la gracilité juvénile ! et que le blond de ses cheveux est pâle auprès des tons étranges et riches dont Rubens a réchauffé la ruisselante chevelure de la sainte pécheresse ! — Tel est le langage que