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avait un peu allumé son teint ; ses yeux étincelaient, ses cheveux débouclés flottaient en arrière ; sa gorge, irritée, soulevait son corset ; elle aspirait fortement l’air par les narines, et tenait ses lèvres comprimées pour n’être pas suffoquée par le vent ; son voile se déroulait sur son dos en plis palpitants et lui donnait quelque chose de transparent et d’aérien. ― Bradamante ou Marphise, ces deux belles guerrières, n’avaient pas à cheval une mine plus fière et plus résolue.

Hélas ! ce n’était pas Fortunio ; ― c’était un assez beau jeune homme, qui ne fut pas médiocrement surpris de voir une jeune femme courir sur lui au grand galop et tourner bride subitement sans lui avoir adressé la parole.

Musidora, fort désappointée, rencontra de nouveau George, qui allait au petit pas comme un curé de village monté sur un âne.

« George, dit-elle, reconduisez-moi ; j’ai perdu mon domestique. »

George mit son cheval à côté du sien, et ils sortirent tous les deux par la porte d’Auteuil.

« Tiens, dit de Marcilly à un de ses camarades, il paraît que le cher George s’est remis avec la Musidora.

― Je crois qu’ils ne se sont jamais quittés complètement, répondit le camarade. Je ne manquerai pas de conter cela à la duchesse de M***, dit de Marcilly ; ― elle va faire une belle vie