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CONTES CORÉENS

de toutes les forces de son âme, parce qu’il ne pouvait rien lui offrir, rien sinon le malheur.

Après avoir lu cette lettre, Diou-Si pleura amèrement, car elle aimait Minoran plus que tout au monde. Elle prit ses biens en haine, elle les distribua aux pauvres et s’en alla loin des lieux où elle avait vécu.

Elle pleurait en traversant la plaine, et songeait : « Si j’avais assez de pain pour en donner à tous les affamés, assez d’argent pour en distribuer à tous ceux qui sont dans le besoin, il n’y aurait plus de misère sur la terre. »

Et tandis qu’elle rêvait ainsi, elle vit soudain paraître devant elle un beau et robuste jeune homme couronné de fleurs et d’épis, monté sur un taureau. Il arrêta sa monture et dit à Diou-Si :

« Aime-moi ! sois ma femme !

— J’aime un Huit-fois malheureux, répondit Diou-Si. Je ne saurais aimer un autre que lui. Mais, si tu le veux, nous deviendrons frère et sœur. »

Et ils fraternisèrent, selon la coutume de leur pays. Ils se firent une légère blessure au doigt et, avec le sang qui en coulait, ils écrivirent chacun leur nom au bas de leur robe. Puis ils déchirèrent le morceau d’étoffe qui portait cette inscription et se l’offrirent l’un à l’autre. Quand ils l’eurent caché dans leur sein, ils se séparèrent.

Harassée de fatigue, Diou-Si entra dans un champ pour se reposer. Elle se coucha sur le sol et s’endormit. Un vieillard, dont le visage et les cheveux étaient blancs