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que pour l’éclat de sa diction, les gens de l’Inde et surtout ceux de Lakhnau se feront gloire et s’enorgueilliront toujours d’avoir produit cet écrivain… Quand vous entendez réciter ses marsiyas, quelque effort que vous fassiez pour retenir vos pleurs, un océan de larmes coule de vos yeux ; votre cœur serait-il de pierre qu’il se dissoudrait… Si en Arabie Amrû’lcaïs a été reconnu comme le dieu de l’éloquence et Moténabbi comme son prophète, alors pourquoi ne pas mettre au même rang dans l’Inde les compositions de Dabir et d’Anis ? Quelque éloge qu’on fasse des écrits de Dabir, cet éloge sera inférieur à la vérité.

« C’est une bonne fortuite pour l’Inde que Mirza Auj, fils de Dabir, ait fait parvenir au directeur de l’imprimerie de l’Awadh Akhbâr tous les brouillons des marsiyas de son père, en sorte qu’aujourd’hui le désir de tout le monde est satisfait[1]. »

Les poésies érotico-mystiques sont toujours fort appréciées par les musulmans. C’est ainsi que le raïs de Muradabad a publié à ses frais le Dard-i dil « la Douleur du cœur », masnawi célèbre d’un poëte hindoustani fort connu, le maulawi Muhammad Abd urraschid Dard[2].

J’ai encore cette année à mentionner un nouveau Tazkïra imprimé à Lakhnau en 1875. Je veux parler du Sukhan-i Schu’arâ « les Discours des poëtes », biographie anthologique[3] par le maulawi Abu Muhammad Abd ulgafûr Khan, connu poétiquement sous le nom de Nassakh, élève de Wahschat (le maulawi Hafiz Raschid unnabi)[4]. On doit à cet éminent écrivain plusieurs autres ouvrages, un poème, entre autres, récemment publié aussi à Lakhnau sous le

  1. Ici le journaliste fournit la liste des trente-quatre marsiyas du premier volume et des trente-quatre du second, en ayant soin de donner le premier hémistiche de chacun de ces marsiyas.
  2. « Hist. de la littér. hind. », t. Ier, p. 408 et suiv.
  3. J’en parlerai plus au long dans l’Appendice.
  4. « Hist. de la Iittér. hind. », t. II, p. 450.