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la France, sur l’Amérique et sur l’Angleterre. Tout ce qui a suivi semble une énigme monstrueuse. Aux Indes nous ne voyons de tous côtés que désespoir. On espérait avec confiance qu’après la guerre l’Inde obtiendrait un résultat sérieux, et cet espoir a été déçu. Il est fort possible, pour ce qu’on en sait, que les réformes attendues[1] n’aient point lieu ; et même si elles avaient lieu, elles ne serviraient à rien. Le projet de la Ligue du Congrès et du Congrès de Delhi, et tous ceux qui ont suivi, ne sont plus à présent que des paroles en l’air. Il nous faut attendre, afin de voir ce qu’amèneront les évènements. Le Pendjab a été le théâtre de scènes révoltantes ; des existences innocentes ont été sacrifiées. La terreur a régné. Le gouffre qui sépare les administrateurs des administrés s’est élargi. Il est impossible, dans de telles questions, d’établir un bilan exact. À combien se monte le crédit ? Y a-t-il quelque chose au débit, et si oui qu’y at-il ? Ou bien n’y a-t-il rien au crédit, et ne nous reste-t-il qu’à faire le total des chiffres au débit ?

À un nuage de désespoir aussi dense et aussi sombre, se peut-il qu’il y ait un envers brillant ? Le 6 Avril, se leva sur l’Inde entière le soleil du Satyâgraha[2]. Les nuages se dispersèrent et l’on vit distinctement les rayons. Seulement il y eut au Pendjab et à Ahmedabad une éclipse, et les ténèbres

  1. Le Cabinet britannique avait annoncé l’intention d’accorder à l’Inde des réformes constitutionnelles importantes.
  2. Satyâgraha, étymologie : Satya juste, droit. Agraha tentative. Essai juste. On l’appliqua spécialement à la Non-acceptation de l’injustice par la maîtrise de soi, — Voir : Romain Rolland : Mahâtmâ Gandhi, p. 52, note 2.