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C’est l’Indien. Il se tient debout et regarde l’horizon. La flamme qui jaillit de ses yeux est douce et pénétrante ; elle est dorée et semblable aux rayons du soleil.

Sa main s’est levée… Les ronflements de houle des chantiers dans la plaine s’apaisent. Les trains d’arbres qui rampaient sur le sol à la façon des reptiles s’arrêtent lentement. Les cuves pleines de boue aurifère qui escaladaient les tours de la drague, et les pelles à vapeur pivotent sur le sol en geignant sous leur fardeau. Et les lourds plateaux de la scierie, les locomobiles et les tracteurs, s’arrêtent, un à un, comme si tous dépendaient d’un unique moteur soudain immobilisé.

Les deux mains tendues vers le ciel, l’Indien ressemble à un prêtre en prières.

La force qui se dégage de lui, et dont le rayonnement m’enveloppe et me pénètre, semble tenir le monde en haleine. La forêt, engourdie, soupire à peine.

Et voici que, sortant des chantiers, innombrable, affolée et précipitant sa course, comme la limaille d’acier attirée par un aimant, la poussière bariolée des hommes jaillit du sol et se répand sur la route qui conduit à l’Indien.

Le Soir, vêtu de soie violette, conduit le cortège des hommes. Des ombres roses et mauves s’étirent sur le marécage en larges éventails.