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nant avec elle la brousse qui recule comme une armée en retraite.

Cependant, ils se taisent. Pourquoi parleraient-ils ? L’histoire est écrite dans l’air embrasé ; elle se déroule sur l’écran tendu par le soleil entre les lames des bardeaux. Les ombres invisibles la racontent à voix basse.

Marthe, le cœur oppressé d’angoisse, supporte avec peine le regard de Pierre.

Elle détourne la tête. Les yeux noyés de rêve de l’homme lui font mal. Ils sont fixés sur un horizon invisible et, lorsqu’ils se tournent vers elle, lointains, il lui semble qu’une lame acérée pénètre dans sa chair.

Elle est fascinée par ce regard dont rien ne la peut plus détacher, ni les voix de la nuit, ni la joie mystérieuse qui monte en elle, ni la douloureuse prière qui l’enveloppe.

Des yeux de Pierre se dégage une force qu’elle n’avait jamais soupçonnée. Ils l’attirent, la retiennent comme un aimant. Elle a l’impression de n’être qu’un jouet cédant au caprice d’une main toute-puissante.

Cela est tout différent de la domination brutale du maître, de l’attrait de l’homme ; c’est une