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XXXIII



SUR la plaine étincelante qui s’étendait à nos pieds, une sorte de lumière pâle apparut tout à coup. C’était une fumée mince, à peine phosphorescente, et qui rampait vers le camp.

Maintenant, le faisceau de lumière avait la hauteur d’un être humain ; il en prenait les contours. Dans une ample draperie, éclairé à contre jour, un corps se dessina.

L’ombre marchait sur le tapis de brouillard et vint vers nous comme une apparition voilée, comme un homme drapé dans un burnous.

Le fantôme entra en grelottant dans la case. Sa présence avait rempli l’ombre d’une clarté d’aube.

A demi soulevé sur le boucan, rejetant la couverture, Pierre Deschamps regardait avec épouvante l’ombre blanche immobile.

— C’est un ombit, dit avec douceur le jeune Indien. N’aie pas peur… les ombits guérissent les malades… parle-lui.

— Je le connais, dis-je à mon tour, c’est un homme vivant… il vient du placer Elysée. Il connaît les hommes de la drague… il vivait au temps de l’ancienne Compagnie… il est revenu. Je lui ai souvent parlé. C’est un homme comme nous. Cependant, il n’a pas de corps.