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II


Pouvez-vous concevoir cela, un bateau où il n’y a personne ?

Je suis assis sur ma couchette et j’écoute le bruit des boiseries qui craquent. La mer donne avec fureur contre la coque ; des paquets d’eau voilent les hublots ; les murs en chêne de la galerie gémissent. J’entends le souffle intérieur des machines ; et les coups des pistons, réguliers, monotones, feutrés, me martèlent l’esprit.

Les couloirs sont déserts. Je promène mon pyjama du salon de musique au salon des secondes, le long des tapis épais qui étouffent les pas. Le piano est couvert de sa housse, et, le long des couloirs, les cabines sont entr’ouvertes, montrant des lits nus, de pauvres lits de fer qui ne furent jamais habités.

Par la porte entre-bâillée, les hublots des cabines regardent dans le couloir, curieusement, mon ombre qui passe. L’armoire se penche, et l’air s’agite comme j’avance ma tête dans l’encadrement de la porte…