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de chaque canot, régularisaient leurs mouvements, évitaient les pointes acérées des rochers, et tenaient, avec leurs avirons, ces frêles cassots d’écorce dans les filets d’eau propices, indiqués par l’état de la surface des ondes et la forme des courants.

On s’était, en partant, recommandé à la bonne sainte Anne et on priait de cœur tout le temps.

— Je n’ai rien vu dans les Sept-chutes, disait dans la suite la femme de Cadieux, qui était une pieuse femme, je n’ai rien vu qu’une Grande Dame Blanche qui voltigeait devant les canots et nous montrait la route !

Les canots furent sauvés et rendus en peu de jours hors de l’atteinte des ennemis au Lac-des-Deux-Montagnes. Mais que faisaient Cadieux et son sauvage pendant tout ce temps, et que devinrent-ils ? Voici ce qui s’était passé, comme on l’a su plus tard de quelques Iroquois et des gens envoyés au devant du brave interprète.

Cadieux avait d’abord laissé les Iroquois s’engager dans le portage. Après avoir choisi l’endroit le plus favorable pour les tenir hors de la vue de la rivière, il s’était placé en embuscade à petite portée du sentier, bien caché dans d’épaisses broussailles : il avait de même embusqué son sauvage à quelques arpents plus haut, pour faire croire à la présence de plusieurs partis une fois l’affaire en train.

Cadieux laissa passer les éclaireurs iroquois, qui furetaient de l’œil les bords du sentier, et les premiers guerriers porteurs des canots, jusqu’à ce que, les ennemis ayant atteint l’endroit occupé par le jeune Algonquin, il entendit le coup de feu de celui-ci et le cri d’un ennemi atteint.

Les Iroquois ainsi subitement attaqués bondirent de surprise et firent halte à l’instant ; mais avant même que les porteurs ne se fussent délivrés de leurs charges, un second coup de fusil, tiré par Cadieux au milieu du convoi, abattit un second guerrier.

Il est probable que Cadieux avait donné rendez-vous à son sauvage dans une espèce de petite savane peu éloignée du portage ; car c’est vers cet endroit que tous deux se dirigèrent, en faisant avec succès le coup de feu à l’abri des taillis.

Les avantages avec lesquels les deux braves faisaient la guerre à leurs nombreux ennemis n’empêchèrent pas, cependant, le jeune