Écoute : depuis quelques mois, tout ce qui a été écrit sur ce sujet ardu, je l’ai lu et médité.
— Voilà donc pourquoi je t’entends si souvent, la nuit, marcher dans ta chambre ?
— Sans doute. Je pense que nous n’avons même plus le temps de dormir si nous voulons prévenir la terrible crise.
— Eh bien ! le résultat de ces profondes études ?…
Prudence se leva et arpenta le parquet à grands pas.
— C’est inutile, dit-il, tu ne saurais me comprendre.
— Tu me regardes donc comme un imbécile ?
— Non, mais comme un vrai bourgeois tout emmaillotté dans les préjugés de ton temps.
— Je me regarde, moi, tout bonnement comme un homme sensé, peu accessible en effet aux billevesées des socialistes, de ces prétendus philosophes qui veulent tout bouleverser, sous prétexte de régénérer.
— Alors, à quoi bon te dire le résultat de mes réflexions ?
— Tu serais donc devenu, toi aussi, un songe-creux ?
— Au contraire, j’ai observé, étudié, en me plaçant en face de la réalité, et j’ai sondé la plaie, le scalpel à la main. Les songe-creux, c’est vous, qui ne voulez pas voir la situation telle qu’elle est, qui vous entretenez dans vos illusions et qui croyez que réprimer les aspi-