puissant elle peut, d’un moment à l’autre, faire crouler la société européenne.
Furibus lisait attentivement le journal. À mesure qu’il avançait dans sa lecture, ses narines frémissaient, ses yeux s’injectaient, ses joues même pâlissaient.
Quand il eut terminé :
— Virginie, dit-il d’une voix étouffée, donne moi un verre d’eau… Ah ! cela va mieux !… C’est que, en lisant cela, je pensais aux ouvriers de mon usine, à leur esprit de révolte, à leurs incessantes réclamations. S’ils étaient affiliés, eux aussi !
— Ils le sont, n’en doute pas. Un de ces jours, ils te feront la loi.
— Mais non, mais non, l’ordre est rétabli, te dis-je. En France, du moins, le monstre est saigné à blanc, et, avant qu’il ne reprenne vie, nous aurons un roi qui mettra l’hydre à la raison.
— Un roi ! et lequel ?
— N’importe lequel, une citrouille au bout d’un bâton, pourvu que cela s’appelle un roi. La royauté seule, c’est-à-dire un pouvoir stable et fort, peut nous sauver.
— Allons donc, la royauté est morte, mon cher. Ce que tu viens de dire le prouve assez : « N’importe lequel, une citrouille au bout d’un bâton. » La royauté n’avait qu’une base : son origine divine, c’est-à-dire le prestige. Or, le prestige n’existe plus, même chez les partisans de la royauté. Un roi ? Il ne règnerait pas deux ans. Depuis mon fatal rêve, je me demande avec angoisse s’il n’y aurait pas un moyen de