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Libre et cDiogène,
Libre Sous ton manteau,
Libre et content, je ris, je bois sans gêne…


C’est seulement lorsque les gardiens entrèrent qu’il cessa de chanter…

Telle s’était écoulée la journée de la veille, telle s’écoula celle-ci ; celle du lendemain fut pareille, les suivantes furent toutes semblables…

Chanter, manger, dormir, soigner ses mains et ses ongles, telle était la vie de ce soi-disant saltimbanque. Son attitude, toujours la même, était celle d’un homme d’un heureux naturel profondément ennuyé.

Telle était la perfection de la comédie soutenue par cet énigmatique personnage, que Lecoq, après six nuits et six jours passés à plat ventre dans son grenier, n’avait rien surpris de décisif.

Pourtant il était loin de désespérer. Il avait observé que tous les matins, à l’heure où la distribution des vivres met en mouvement les employés de la prison, le prévenu ne manquait pas de répéter sa chanson de Diogène.

— Évidemment, se disait le jeune policier, cette chanson est un signal. Que se passe-t-il alors, du côté de cette fenêtre que je ne vois pas ?… Je le saurai demain.

Le lendemain, en effet, il obtint que Mai serait conduit à la promenade à dix heures et demie, et il entraîna le directeur à la cellule du prisonnier.

Le digne fonctionnaire n’était pas content du dérangement.

— Que prétendez-vous me montrer ? répétait-il, qu’y a-t-il de si curieux ?…