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JEAN RIVARD

de M. Lacasse et d’Arnold, traînant sur des menoires croches (espèce de véhicule grossier, sans roues ni essieu, ni membres d’aucune espèce, inventé pour les transports à travers les bois,) les grains de semence et divers autres articles achetés par Jean Rivard.

Jamais Louiseville n’avait vu tant d’êtres vivants ni tant de richesse réunis dans son enceinte. C’était plus qu’il n’en fallait pour inspirer au facétieux Pierre Gagnon un feu roulant de joyeux propos, et la forêt retentit une partie de la nuit des éclats de rire de toute la bande, mêlés aux beuglements des animaux, les premiers sans doute qui eussent encore retenti dans cette forêt vierge.

Les hommes de M. Lacasse et d’Arnold repartirent le lendemain matin, emportant avec eux deux cents livres de sucre que Jean Rivard donnait en déduction de sa dette.

À Louiseville, une partie de cette journée se passa en arrangements et préparatifs de toutes sortes. Et quand tout fut prêt, Jean Rivard s’adressant à ses deux hommes :

« Mes amis, dit-il, vous voyez ces quinze arpents d’abattis ? Il faut que dans deux mois toute cette superficie soit nettoyée, que ces arbres soient consumés par le feu, que les cendres en soient recueillies, et que ce terrain complètement déblayé et hersé, ait été ensemencé. Nous ne nous reposerons que lorsque notre tâche sera remplie. »

Puis se tournant vers Pierre, en souriant : « c’est la campagne d’Italie qui va s’ouvrir, dit-il : pour reconnaître tes services passés, je te fais chef de brigade ; Lachance sera sous ton commandement, et toi, tu recevras tes ordres directement de moi. Je ne