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ÉCONOMISTE.

à un prix relativement considérable. Je m’étais dit, pour justifier mon extravagance, que ce cheval servirait d’étalon reproducteur pour tout le canton de Bristol ; que par ce moyen je me rembourserais en partie de la somme qu’il m’avait coûté, sans compter qu’il contribuerait à renouveler en peu d’années les races de chevaux dégénérés possédés par la plupart des habitants du canton. Mais j’eus le chagrin cette fois de n’être pas approuvé par ma Louise qui prétendit que j’aurais dû attendre quelques années encore avant de faire une acquisition aussi coûteuse. C’était la première fois que Louise me faisait une remarque de ce genre et je m’en souviendrai longtemps. Sans vouloir me justifier tout-à-fait, je dois dire pourtant que Lion (c’est le nom de ce noble quadrupède) n’est pas sans avoir exercé quelque influence sur les destinées du canton. Tu sais combien les cultivateurs canadiens raffolent des chevaux. C’est pour eux un sujet intarissable de conversation. L’arrivée de Lion à Rivardville fut un des événements de l’année. Toute la population voulut le voir ; pendant longtemps on ne parla que de Lion, et personne n’était plus populaire à dix lieues à la ronde. Tu ne seras pas surpris d’entendre dire dans quelques années que les habitants du canton de Bristol et des environs possèdent une magnifique race de chevaux. Je prends aussi occasion des nombreuses visites qui me sont faites pour inculquer dans l’esprit des cultivateurs quelques notions simples et pratiques sur l’agriculture, sur les meilleures races d’animaux, sur les ustensiles agricoles, et même sur l’importance des améliorations publiques, des institutions municipales et de l’éducation des enfants. Sous ce der-