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JEAN RIVARD

qu’on reçoit en y entrant, comme un reflet du bonheur de ceux qui l’habitent. Douze chaises de bois et une couple de fauteuils ont remplacé les bancs grossiers de la cabane primitive ; une table de bois de pin, d’une certaine élégance, recouverte d’une toile cirée, sert de table à dîner ; le lit large et moelleux apporté par Louise a remplacé le grabat des deux années précédentes ; quelques lisières de tapis de catalogne, fabriqué à Grandpré par Louise Routier elle-même, couvrent le plancher de la petite chambre de compagnie. C’est aussi dans cette dernière chambre que se trouve le buffet ou l’armoire contenant le linge de ménage.

La chambre à coucher des jeunes époux ne se distingue par aucun meuble ou ornement superflu. À part le lit et l’armoire de Louise, une couple de chaises et le miroir indispensable, on n’y voit qu’un petit bénitier et un crucifix en bois peint suspendus à la tête du lit, et un cadre modeste représentant la sainte Vierge et l’enfant Jésus.

Dans la salle à dîner, à part les chaises, la table et le garde-manger, on ne voit qu’une pendule qui peut avoir coûté de cinq à dix chelins, et la croix de tempérance, accolées sur la cloison.

Toute modeste cependant que soit cette habitation elle peut passer pour splendide comparée à celle qu’occupait Jean Rivard durant les deux premières années de son séjour dans la forêt.

J’entends ici le lecteur s’écrier : Quelle cruauté ! quel égoïsme de la part de Jean Rivard ! Comment n’avait-il pas prévu que la jeune fille élevée dans une riche et populeuse campagne, entourée de parents affectionnés, d’aimables et joyeux voisins, reculerait