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ÉCONOMISTE

de parcourir tous ces volumes ? il est rare que je passe une journée sans lire une heure ou deux. Dans l’hiver, les soirées sont longues ; en été, j’ai moins de loisir, mais j’emporte toujours au champ un volume avec moi. De cette manière, j’ai pu lire tout ce que vous voyez dans ma bibliothèque ; il est même certains volumes que j’ai relus jusqu’à trois ou quatre fois.

Et comme nous nous préparions à laisser la précieuse armoire, Jean Rivard attira mon attention sur quatre volumes un peu vieillis et usés qui se trouvaient seuls, à part, dans un coin.

Vous n’avez pas regardé ces livres-là, me dit-il, et pourtant ce ne sont pas les moins intéressants.

En les ouvrant, je vis que c’était : Robinson Crusoé, les Aventures de Don Quichotte, la Vie de Napoléon et l’Imitation de J. C.

Ce sont mes premiers amis, mes premiers compagnons de travail : je les conserve précieusement. Robinson Crusoé m’a enseigné à être industrieux, Napoléon à être actif et courageux, Don Quichotte m’a fait rire dans mes moments de plus sombre tristesse, l’Imitation de Jésus Christ m’a appris la résignation à la volonté de Dieu.

C’est dans cet appartement que je passe la plus grande partie de mes heures de loisir. J’y suis généralement de cinq à sept heures du matin, surtout en hiver. C’est ici que je veille avec ma femme et mes enfants quand nous n’avons pas de visite ou que nous n’avons que des intimes. Nous lisons, nous parlons, nous écrivons en compagnie de ces grands génies dont les œuvres couvrent les rayons de ma bibliothèque. J’ai passé ici bien des moments délicieux.