Page:Fuster - Le Cœur, 1892.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
Seul.

SEUL

Au comte A. de l’Estoille.

Personne sur la plage. Au loin, le soleil fume,
Rouge, et son disque fauve envahi par la mer.
Toute la mer s’embrase avec l’espace clair.
Et le nuage en feu se marie à l’écume.

Personne autour de moi, lorsque le grand aïeul
S’enfonça dans l’abîme et rentra dans son rêve :
— Pour moi seul l’infini des flots battait la grève
Et l’infini des cieux y tombait pour moi seul.

Que n’étiez-vous donc là, vous, mes sœurs inconnues,
Âmes, lourdes d’angoisse, en qui le deuil se plaît !
Devant cette splendeur que nul ne contemplait,
Quelle extase pour vous, si vous étiez venues !

Vous auriez oublié le mal, compris le bien,
Devant deux infinis illuminant leurs routes.
— Seul en face de Dieu, j’adorais pour vous toutes,
Et tous les cœurs du monde ont battu dans le mien !