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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

soit qu’ils fussent venus de pays étrangers, soit qu’ils se fussent échappés du γένος et de la tribu pour être libres. Mais ces hommes souffraient d’une autre manière ; ils se trouvaient dans un état d’infériorité morale vis-à-vis des autres hommes, et une sorte d’ignominie s’attachait à leur indépendance.

Il y avait donc, après la réforme politique de Solon, une autre réforme à opérer dans le domaine de la religion. Clisthènes l’accomplit en supprimant les quatre anciennes tribus religieuses, et en les remplaçant par dix tribus qui étaient partagées en un certain nombre de dèmes.

Ces tribus et ces dèmes ressemblèrent en apparence aux anciennes tribus et aux γένη. Dans chacune de ces circonscriptions il y eut un culte, un prêtre, un juge, des réunions pour les cérémonies religieuses, des assemblées pour délibérer sur les intérêts communs[1]. Mais les groupes nouveaux différèrent des anciens en deux points essentiels. D’abord, tous les hommes libres d’Athènes, même ceux qui n’avaient pas fait partie des anciennes tribus et des γένη, furent répartis dans les cadres formés par Clisthènes[2] : grande réforme qui donnait un culte à ceux qui en manquaient encore, et qui faisait entrer dans une association religieuse ceux qui auparavant étaient exclus de toute association. En second lieu, les hommes furent distribués dans les tribus et dans les dèmes, non plus d’après leur naissance, comme autrefois, mais d’après leur domicile. La naissance n’y compta pour rien ; les hommes y furent égaux et l’on n’y connut plus de priviléges. Le culte, pour la cé-

  1. Eschine, in Ctesiph., 30. Démosth., in Eubul. Pollux, VIII, 19, 95, 107.
  2. Aristote, Pol., III, 1, 10 ; VII, 2. Schol. ad Æsch., éd. Didot, p. 511.