Les noms de beaucoup de ces divinités sont oubliés ; c’est par hasard qu’on a conservé le souvenir du dieu Satrapès qui appartenait à la ville d’Élis, de la déesse Dindymène à Thèbes, de Soteira à Ægium, de Britomartis en Crète, de Hyblæa à Hybla. Les noms de Zeus, Athéné, Héra, Jupiter, Minerve, Neptune nous sont plus connus et nous savons qu’ils étaient souvent appliqués à ces divinités poliades. Mais de ce que deux villes donnaient à leur dieu le même nom, gardons-nous de conclure qu’elles adoraient le même dieu. Il y avait une Athéné à Athènes et il y en avait une à Sparte ; c’étaient deux déesses. Un grand nombre de cités avaient un Jupiter pour divinité poliade ; c’étaient autant de Jupiters qu’il y avait de villes. Dans la légende de la guerre de Troie on voit une Pallas qui combat pour les Grecs, et il y a chez les Troyens une autre Pallas qui reçoit un culte et qui protége ses adorateurs[1]. Dira-t-on que c’était la même divinité qui figurait dans les deux armées ? Non certes ; car les anciens n’attribuaient pas à leurs dieux le don d’ubiquité. Les villes d’Argos et de Samos avaient chacune une Héra poliade ; ce n’était pas la même déesse, car elle était représentée dans les deux villes avec des attributs bien différents. Il y avait à Rome une Junon ; à cinq lieues de là, la ville de Veii en avait une autre ; c’était si peu la même divinité que nous voyons le dictateur Camille, assiégeant Veii, s’adresser à la Junon de l’ennemi pour la conjurer d’abandonner la ville étrusque et de passer dans son camp. Maître de la ville, il prend la statue, bien persuadé qu’il prend en même
- ↑ Homère, Iliade, VI, 88.
674. Pausanias, I, 24 ; IV, 8 ; VIII, 47. Aristoph., Oiseaux, 828 ; Chev., 577. Virgile, IX, 246. Pollux, IX, 40. Apollodore, III, 14.