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LIVRE III. LA CITÉ.

teurs d’Athènes, y avaient des temples. Abdère faisait des sacrifices à son fondateur Timésios, Théra à Théras, Ténédos à Ténès, Délos à Anios, Cyrène à Battos, Milet à Nélée, Amphipolis à Hagnon[1]. Au temps de Pisistrate, un Miltiade alla fonder une colonie dans la Chersonèse de Thrace ; cette colonie lui institua un culte après sa mort, « suivant l’usage ordinaire[2]. » Hiéron de Syracuse ayant fondé la ville d’Ætna, y jouit dans la suite du culte des fondateurs[3].

Il n’y avait rien qui fût plus à cœur à une ville que le souvenir de sa fondation. Quand Pausanias visita la Grèce, au second siècle de notre ère, chaque ville put lui dire le nom de son fondateur avec sa généalogie et les principaux faits de son existence. Ce nom et ces faits ne pouvaient pas sortir de la mémoire, car ils faisaient partie de la religion, et ils étaient rappelés chaque année dans les cérémonies sacrées.

On a conservé le souvenir d’un grand nombre de poëmes grecs qui avaient pour sujet la fondation d’une ville. Philochore avait chanté celle de Salamine, Ion celle de Chio, Criton celle de Syracuse, Zopyre celle de Milet ; Apollonius, Hermogène, Hellanicus, Dioclès avaient composé sur le même sujet des poëmes ou des histoires. Peut-être n’y avait-il pas une seule ville qui ne possédât son poëme ou au moins son hymne sur l’acte sacré qui lui avait donné naissance.

Parmi tous ces anciens poëmes, qui avaient pour objet la fondation sainte d’une ville, il en est un qui n’a pas péri, parce que si son sujet le rendait cher à une cité,

  1. Hérodote, I, 168. Pindare, Pyth., IV. Thucyd., V, 11. Strabon, XIV, 1. Plutarq., Quest. gr., 28. Pausanias, I, 34 ; III, 1. Clément d’Alex., Cohortat., p. 35.
  2. Hérodote, VI, 38
  3. Diodore, XI, 78.