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souvenirs d’une actrice.

l’arbre qui était au sommet de la Montagne que nous chantâmes :

Père de l’univers, suprême intelligence,
Bienfaiteur ignoré des aveugles mortels,
Tu révélas ton être à la reconnaissance, etc.

Cette cérémonie finit fort tard. Nous mourions de soif et de faim ; Talma et David eurent grand’peine à nous trouver quelque chose à manger ; encore fûmes-nous obligées de nous cacher, car cela aurait pu paraître trop prosaïque à Robespierre, qui, placé au sommet de la Montagne, croyait sans doute que cette nourriture d’encens devait nous suffire. Ce fut là, a-t-on rapporté depuis, que Bourdon (de l’Oise) lui dit :

« Robespierre, la roche Tarpéïenne est-près du Capitole ![1] »

C’est la première fois que je vis de près ce député qui faisait trembler tout le monde. Je le vis encore le jour où l’on mangea devant les portes. Des tables étaient placées rue Richelieu, devant le théâtre de la

  1. Cela se répétait le lendemain.