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souvenirs d’une actrice.

étroites : je la traversai en courant ; les poutres embrâsées menaçaient de me tomber sur la tête. Un gendarme eut la complaisance de m’accompagner et de me soutenir jusqu’à la sortie de la ville, car la foule était tellement compacte qu’on était heurté de tous côtés. Il me demanda pourquoi j’avais traversé la ville. Je lui répondis que c’était pour y trouver des officiers de la maison de l’Empereur. » — Il y a long-temps, reprit-il, que l’Empereur est parti, et vous ne pourrez plus les rejoindre. — Eh bien ! lui dis-je, je n’ai plus qu’à mourir, car je n’ai pas la force d’aller plus loin. »

Je sentais que le froid m’engourdissait le sang. On prétend que cette asphyxie est une mort très douce, et je le crois. J’entendais bourdonner à mon oreille : « Ne restez pas là !… Levez-vous !… » On me secouait le bras ; ce dérangement m’était désagréable. J’éprouvais ce doux abandon d’une personne qui s’endort d’un sommeil paisible. Je finis par ne rien entendre, et je perdis tout sentiment. Lorsque je sortis de cet engourdissement, j’étais dans une maison de paysan. On m’avait enveloppée de fourrures, et quelqu’un me tenait le bras et me