Page:Fusil - Souvenirs d’une actrice, Tome 2, 1841.djvu/320

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
316
souvenirs d’une actrice.

chemin ; mais au moins je n’étais pas seule ; il passait quelques troupes, et des soldats bivouaquaient à côté de nous.

Nos gens ne revenant pas du fourrage, nous craignîmes qu’ils n’eussent été pris. Sur les dix heures, mon aimable compagnon de voyage rencontra son colonel, et j’entendis qu’il lui dit :

— Mon colonel, j’ai été blessé, et on m’a mis dans cette voiture, mais les chevaux ne pouvant aller plus loin, j’ai envoyé mes gens chercher du fourrage ; je pense qu’ils nous ont abandonnés, car ils ne reviennent pas,

— Je vous conseille, répondit le colonel, de monter à cheval et de brûler la calèche.

— Je vous suis très obligé de ce conseil, lui dis-je ; mais je vous ferai observer que monsieur n’a aucun droit sur cette calèche, et que c’est à moi seule qu’on l’a donnée.

Et sur cela je me retournai et m’endormis profondément. Vers minuit, mon compagnon de voyage ayant retrouvé son domestique et son cheval, il descendit de la calèche avec tant de précipitation, qu’il n’eut pas le temps de me dire un mot d’excuse ;