Page:Fusil - Souvenirs d’une actrice, Tome 2, 1841.djvu/208

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
204
souvenirs d’une actrice.

soupers, dont on n’avait pas manqué de lui parler. J’acceptai, et j’eus grand soin d’en prévenir mes convives, car les truffes étaient un grand luxe dans un temps où les communications n’étaient ni si promptes ni si faciles qu’à présent. On ne pouvait s’imaginer d’où venait cette magnificence.

On commençait à se rassembler, lorsque le fameux petit pâté arriva ; il était d’une telle dimension, qu’on fut obligé de le pencher sur le côté pour le faire passer par la porte ; je vis le moment où la salle à manger ne pourrait le contenir. On rassembla force papier pour le couper sur le rond de bois qui avait servi à le transporter.

On ne peut se faire une idée de toutes les folies qui furent dites autour de ce pâté. Je fus généreuse : le lendemain j’en envoyai à toutes mes connaissances. Ce pâté avait fait du bruit, car, lorsque M. de Narichkine vint à Moscou, il me parla de mon petit pâté. Il était connaisseur, et dans le cas d’apprécier le mérite d’un semblable cadeau.

— Je suis seulement inquiet, me dit-il, de savoir