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ABA. ABA.


ne, & attendre tout du hasard & du bonheur. S’abandonner à la joye, c’est-à-dire en goûter tout le contentement, & en ressentir tous les plaisirs. S’abandonner à l’oisiveté, c’est-à-dire jouïr d’un repos calme & tranquille, loin de l’embarras des affaires. Il faut s’abandonner à son feu, & ne rien refuser de ce que l’imagination presente. Bou. Il se trouvoit malheureux d’être abandonné à lui-même, & ses propres pensées, sans avoir quelqu’un qui pût le plaindre, & lui donner de la force. P. de Cl. Il est plus seur de s’arrêter à l’autorité de l’Eglise, que de s’abandonner aux foibles efforts de nôtre miserable raison. Nic.

Abandonner au bras seculier, c’est Renvoyer un Ecclesiastique devant des Juges laïques pour donner une sentence de condamnation à peine afflictive sur un cas privilegié.

On le dt aussi de l’Inquisition. Lors qu’elle a prononcé sur le crime d’heresie, elle livre les coupables au bras séculier ; parce que l’Eglise n’ayant point la puissance temporelle pour infliger la peine de mort, elle implore le secours du juge temporel, qui ne manque point d’executer les arrêts du S. Office. C’est ce qu’on appelle abandonner au bras seculier.

Abandonner, signifie encore, Quitter, jetter là. Il abandonna ses armes.

Abandonner, signifie encore, Quitter un lieu, en sortir. Il a abandonné le païs. On lui fit abandonner la ville.

Abandonner, signifie encore, Laisser, donner. Dans une traduction en prose où l’on abandonne tous les termes de la langue au Traducteur, il demeure souvent au dessous de l'original. S. Ev. Je vous abandonne cette affaire, je vous en laisse le maître. Je vous abandonne à vous-même, & à vôtre propre conduite.

Abandonner, signifie encore, Exposer, commettre à. Abandonner quelqu’un à la haine publique. S’abandonner au danger de perdre la vie pour la Religion.

Abandonner, signifie aussi simplement, Quiter, laisser, renoncer à quelque profession, ou à quelque personne. Abandonner une entreprise. Son crédit & sa réputation l'ont abandonné. Les plus sages ne sont pas toujours maîtres d’eux-mêmes, & il y a des momens où leur discrétion les abandonne ; c’est-à-dire qu’elle les quitte, en sorte qu’ils se laissent aller à l'impatience de parler. Ce Marchand a abandonné le commerce. Ce Magistrat a abandonné les affaires pour vivre dans la retraite. Les personnes vaines abandonnent aux ames communes le mérite d’une vie suivie & commune. LA Br.

Mainte veuve souvent fait la dechevelée,
Que n’abandonne pas le soin du demeurant. LA Fon.

On dit en termes de Fauconnerie, Abandonner l’oiseau, pour dire, le mettre libre en campagne, ou le congedier tout-à-fait, & s'en defaire entierement.

On dit proverbialement, N’abandonnez pas les étriez ; pour dire, servez-vous bien des avantages que vous avez, ne les quitez point.

Abandonné, ée. part. pass. & adj. Biens abandonnez. L’amitié généreuse court aux personnes abandonnées, pour essuyer leurs larmes. M. Esp. Il faut que vous soyiez les plus abandonnez calomniateurs qui furent jamais. Pasc. En ce sens il signifie des gens déterminez, & qui ne gardent aucunes mesures pour noircir la réputation d’autrui.

On dit absolument au substantif, C’est un abandonné, pour dire, un homme perdu & débauché, qui ne donne point d’espérance de conversion. On dit aussi une abandonnée, pour dire une fille prostituée. Je ne veux point brûler pour une abandonnée. Mol.

On dit aussi, Abandonné des Médecins, pour dire, que la guérison de quelcun est désespérée. Un homme aban-


donné, signifie un homme sans appui & sans secours, Abandonne à son sens réprouvé. C’est une expression de l'Ecriture, pour designer un homme qu’on laisse à ses égaremens, & à la perversité de son cœur. On ne doit pas attendre des lumières bien pures de ceux que Dieu a abandonnez aux ténèbres inséparables des grands crimes. Nic. On dit aussi, qu’une cause est abandonnée, pour dire, qu'elle est déplorable & insoutenable.

ABAQUE. s. m. Terme d’Architecture. C’est la partie supérieure, ou le couronnement du chapiteau de la colonne. Il est quarré au Toscan, au Dorique, & à l’Ionique antique ; et échancré sur ses faces aux chapiteaux Corinthien & Composite. Il sert comme de couvercle à la corbeille ou au panier de fleurs qu’elle represente. On l’appelle autrement taillure, & il s’en met en plusieurs sortes d’endroits. Ce mot vient du Grec abax, qui signifie buffet, credence, ou table.

ABASSI ou ABASSIS. C’est une monnoye qui a cours en Perse & en Orient, qui vaut environ dix huit sous six deniers.

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s.m. Signifie entre les Marchands de bois, la peine & les frais pour abatre les bois qui sont sur pied. C’est à l'acheteur à payer l'abatage.

ABATANT, s. m. Terme de Marchand de drap. Espèce de dessus de table qu’on élevé au fond d’une boutique, & à chaque bout des magasins, & qui s'eleve ou s’abat, selon le jour que l'on veut donner au lieu où l'on vend la marchandise.

ABATARDIR, v. act. Rendre sauvage, corrompre, gâter, altérer la nature de quelque chose, la faire decheoir de son premier état. La misère & l'esclavage ont abâtardi le courage des Grecs. La trop grande avidité des richesses a abâtardi les mœurs.

Il ne se dit guere qu’avec le pronom personnel, & signifie Dégénérer, s’avilir, se corrompre. Toutes les bonnes choses s’abâtardissent avec le temps. Les plantes d’Orient qu’on apporte en Europe s’abatardissent, & perdent beaucoup de leur bonté. Cette Maison s’est abâtardie dans l'oisiveté, elle ne produit plus de grands hommes. La vertu Romaine s’abâtardit si fort, qu’elle ne pût résister à la force des Barbares.

Abatardi, ie. part. pass. & adj.

ABASTARDISSEMENT. s. m. Diminution de valeur, de merite, de bonnes qualitez. Les delices d’un païs causent l’abastardissement du courage des peuples. Ils sont tombez dans un honteux abâtardissement. Nic.

ABATE’E, en termes de Marine, se dit du mouvement d’un vaisseau en pane, qui arrive de lui-même jusqu’à un certain point, après quoi il revient au vent.

ABATEIS. Vieux mot qui signifioit autrefois Forest. Il est hors d’usage.

ABATEMENT. s. m. Foiblesse, manque de forces. Ce malade est dans un grand abatement, les forces luy manquent.

Abatement se dit figurément en Morale. Cet homme est dans un grand abatement d’esprit depuis le renversement de sa fortune.

ABATEUR. s. m. Qui abat, qui fait choir. Cet homme est un grand abateur de bois, ou de quilles : ce qui se dit proverbialement au figuré de celuy qui vante ses prouesses, ou qui se glorifie de faire beaucoup de choses au dessus de ses forces.

ABATIS, s. m. Démolition, renversement, ruine. Il y a eu un grand abatis de maisons par le tremblement de terre. Il y a plusieurs abatis de pierre dans cette carrière. Les Carriers appellent ainsi la pierre qu’ils ont détachée, soit celle qui est bonne pour bâtir

soit