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PREFACE DE LA PREMIERE EDITION.

On veut seulement avoüer, qu'il peut devenir meilleur : & c'est pourquoy le Sieur Reinier Leers, à qui le public est redevable de l'impression de ce livre, prie ceux qui y trouveront quelque chose ou à corriger, ou à ajoûter, de le luy faire tenir, afin que si le debit des Exemplaires le fait songer à une nouvelle Edition, elle puisse être plus parfaite, que par le soin que prendront des personnes intelligentes de mettre chaque chose à sa place, & de luy fournir leurs observations particulieres : de quoy ils luy ont dêjà donné leur parole. Ceux qui souhaitteront qu'on leur fasse honneur des Avis & des Memoires qu'on tiendra d'eux, seront servis selon leur envie.

On a lieu d'esperer que cette priere ayant son effet à l'égard de quantité de Lecteurs habiles, & affectionnez au bien public, & à l'honneur de leur langue, l'on pourra avec le temps faire porter à ce Dictionaire le titre d'Universel en toute rigueur. Il faudroit pour cela y enfermer tous les mots qui étoient en usage du temps de Ville-Hardoüin, de Froissard, de Montrelet, du Sire de JoinVille, & de nos vieux Romanciers. Mais peut-être seroit-il plus à propos d'en faire un Volume à part, que l'on intituleroit l'Archeologue, ou le Glossaire de la langue Françoise. Un pareil Volume, s'il étoit entrepris par des gens aussi doctes que Mr. Du Cange, pourroit devenir un Ouvrage tres-curieux, & tres-fecond en mille sortes d'éclaircissemens. On y pourroit inserer l'Histoire des mots, c'est à dire, le temps de leur regne, & celuy de leur decadence, avec les changements de leur signification. Il faudroit observer à l'égard de ces vieux termes ce qu'on pratique dans les Dictionaires des langues mortes, c'est de cotter les passages de quelque Auteur qui les auroit employez, On ne feroit pas mal non plus de se répandre sur les Ouvrages des anciens Poëtes Provençaux ; & rien ne serviroit plus à perfectionner la science etymologique, qu'une recherche exacte des mots particuliers aux diverses Provinces du Royaume ; car on connoîtroit par là l'infinie diversité de terminaisons & d'alterations de syllabes, que souffrent les mots tirez de la même source ; ce qui donneroit une nouvelle confirmation, & plus d'extension aux principes de cet art, & justifieroit plusieurs conjectures qui ont servi de sujet de raillerie à quelques mauvais plaisans. Ceux qui auront lû les Antiquitez Gauloises & Françoises du Sieur Pierre Borel Medecin de Castres, imprimées à Paris l'an 1655. & citées quelquefois par Mr. Furetiere, conviendront de ce que l'on vient de dire. Car cet Auteur s'est servi utilement plus d'une fois de la langue de son pays, pour expliquer le sens & l'origine des vieux termes. Mais combien de choses a-t-il laissé à faire à ceux qui voudront marcher aprés luy ? C'est donc un fort beau dessein que celuy d'un Archeologue ou d'un Glossaire de nôtre langue.