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L’HOMME À L’HISPANO

l’un près de l’autre, séparés par l’épaisseur des barreaux et la porte toujours fermée. Elle dit qu’une femme de chambre restait occupée au premier étage et que, dans peu d’instants, cette servante se retirerait. Stéphane préférait attendre pour ouvrir que toute la maison fût libérée.

Il dit :

— Je me suis hâté. Je suis venu trop vite.

Elle répondit non d’une voix tendre et bonne. Ils restèrent ainsi, murmurant leur amour, dans une jouissance exquise de leurs esprits. Pas plus que lui, elle n’avait l’habitude des rencontres furtives. Elle éprouvait une joie amusée de leur stratagème. C’était, lui semblait-il, un souvenir qu’ils cueillaient pour ajouter à tous ceux qu’ils auraient ensemble. Elle pensait obscurément que cette halte de son amant sur la porte de sa maison lui porterait chance et que c’était la forme même du bonheur qui attendait et découpait ainsi son ombre sur le mur.

Quelqu’un passa. Dewalter se dissimula mieux dans l’angle de la marche supérieure. Il sentit le souffle charmant de Stéphane. Ils se taisaient en riant avec joie. Enfin tout fut tranquille dans la maison, mais, par jeu, elle prolongea deux ou trois minutes encore leur supplice. Sur leurs corps étirés — entre eux — ils sentaient le froid de l’obstacle et les méchants barreaux comme l’épée nue de Tristan. Enfin, elle fit tourner la clef silencieuse. Il foula les tapis de la maison, et,