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L’HOMME À L’HISPANO

rare, très précieux et je ne l’ai jamais rencontré.

Elle le détaillait avec joie. Pourtant il lui parut trop grave. Souriante, pour le taquiner un peu, elle dit :

— Vous n’avez qu’un défaut… Vous êtes un peu triste.

Il surgit de lui-même et répondit avec une indéfinissable exagération :

— Je ne suis pas triste, puisque j’ai tout.

Et, à son tour, il parla. Le vin de Champagne, son exaltation grandissante depuis huit jours, l’atmosphère enivrante du lieu et jusqu’aux paroles de Stéphane, lui donnèrent le don de se peindre. Dans un mélange de regret et de désir, il se montra tel qu’en effet sa mère l’avait créé, tel qu’il aurait dû se développer si son destin le lui avait permis. Stéphane avait raison sans le savoir. Toujours devant le pauvre en marche qu’il était, dansait comme un fantôme, son double somptueux. Et c’est celui-là qui s’exprimait :

— Vous avez raison. Je ne crois pas que vous trouveriez facilement un homme animé de plus d’amour, et, en même temps, du désir de tout ce que la vie peut offrir de beau, de précieux, dans la facilité du plaisir. Vous m’avez bien compris. J’aime en effet tout ce qui orne l’existence, les beaux chevaux, les paysages assouplis par la science des jardiniers, les objets rares, les musiques les plus divines. Je suis un poète dans mon aversion de tout ce qui est médiocre. Et, en même