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L’HOMME À L’HISPANO

certitude que l’amour est une maladie de l’esprit comme l’agoraphobie ou la folie furieuse. Il ne niait pas qu’il y eût des amants, mais comme il y a des opiomanes. Son rêve était de les enfermer. Il professait d’ailleurs que de tout petits établissements, avec bains, douches, camisoles, eussent été suffisants. Il disait :

— Des malades de ce genre, des vrais, il y en a très peu. Les autres, presque tous sont des simulateurs. Il n’y a pas d’amour. C’est de la blague. On possède et on s’en va. Sinon, c’est l’intérêt qui parle : argent, vanité, sens pratique. Ou bien on est fidèle, comme on est sédentaire, parce qu’on est cul-de-jatte ou qu’on n’a pas d’argent pour prendre un billet. Ceux qui insistent sont des escrocs. L’amour, c’est la réussite de l’abus de confiance.

Une joie profonde, celle du requin dans l’eau, se coulait en lui quand il se plongeait dans cette négation passionnelle. Il riait d’un rire cuivré, montrant ses dents courtes et solides. À chacun des traits lancés, sa jubilation augmentait. Peut-être l’attitude de sa femme y était-elle pour quelque chose. Il niait la passion, mais il faisait profession de la haïr. Étrange anomalie ! Comment peut-on haïr ce qui n’existe pas ?

Quand Oswill découvrit cette contradiction, il apprit subitement beaucoup d’autres choses sur lui-même.

Lady Oswill était faite de telle façon que bien