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l’homme à l’hispano

selles, de tableaux précieux, de statues religieuses. Le magasin, profond, était encombré comme une voiture de déménagement gigantesque et, dans les étroites allées qui restaient aménagées, ils se coulaient avec agilité, ainsi que des rats dans le ventre d’un navire. Autour d’eux, des fortunes dormaient sous la poussière, ensevelies dans une demi-obscurité qui régnait par économie. Parfois, la boutique fermée, le soir, ils sortaient de tiroirs secrets des soies merveilleuses et ils les faisaient chatoyer avec bonheur près de la table boiteuse où ils avaient dîné d’un ragoût.

Le collier, exposé dans la vitrine, jouait maintenant aux mains de Stéphane. C’était un bel objet. Le Napolitain en exigeait quatorze mille francs :

— Ce n’est pas cér, disait-il en agitant des mains arrondies qui paraissaient sans os, pareilles à des petites poulpes et tachées comme elles de plaques violettes, — pas cér du tout. Relardo l’a payé treize mille…

Relardo, c’était lui-même, dont il parlait avec affection comme d’un complice. Et Mme Relardo roulait des yeux candides dans son visage blafard, et souriait, obséquieuse, en se rappelant les six mille francs qu’elle avait donnés pour acquérir la vieille rivière.

Elle connaissait lady Oswill et déjà flairait qu’elle allait vendre au prix demandé. Stéphane, visiblement, se décidait. Georges la devança et