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l’homme à l’hispano

— Et il parait qu’il est bel homme, cria de son coin l’ancienne galante. C’est un roman, un vrai roman. Je le sais par ma femme de ménage qui est native d’Oloron. Elle était dimanche là-bas. Elle les a vus chez le pâtissier.

Le vieux garde mangeait toujours et ne disait plus rien, par respect. S’il avait parlé, il aurait confirmé ce qu’il entendait : l’amour, la fortune, la beauté, tout cela c’était vrai comme le jour L’opinion publique est une épidémie. On ne sait quel microbe la fait éclater.


Pendant ce temps, bien loin, sur la grande terrasse de Saint-Germain-en-Laye, où chaque après-midi, depuis trente années, il se promenait une heure, Montnormand songeait à la lettre nouvelle qu’il avait reçue de Dewalter. Dans cette lettre, Dewalter lui apprenait qu’il était à Oloron, que tout s’arrangerait bientôt et qu’il le prierait de venir. Le style était calme, net, sans aucune trace de dépression. Montnormand se réjouissait, croyant son ami exaucé. Il regardait Paris, muet au loin sous son couvercle de fumées. Il admirait que les prières des hommes fussent entendues quand, pourtant si prochaine, la ville saturée de cris semblait environnée de silence. Sa belle petite âme s’élevait. Une tendresse charmante rendait joli son visage de chien de berger. Mais, dans les quartiers pauvres de la grande cité, la mouche apprivoisée charognait pour le compte de sir Oswill…