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l’homme à l’hispano

— Nicolaï, criait Supervie, tu vois ce perdreau que tu manges ? Tu le vois ? Il vient de chez toi. C’est un braconnier qui me l’a porté. Et, tout à l’heure, tu le paieras.

— Quand il aura mes plombs dans les fesses, ton braconnier, c’est lui qui tu feras rôtir, disait Nicolaï, la bouche pleine.

Supervie, qui savait tout, interpellait aussi l’antiquaire :

— C’est dans le château de ses patrons que vous pourriez, vous, faire bonne chasse. Il y en a, là-dedans !

L’antiquaire roulait des yeux pleins de regrets :

— Je le sais bien, ronchonnait-il. Sans inventaire, rien que pour les meubles, je mettrais quinze cent mille francs sur un chèque.

— Tu peux te taper, narquoisait Supervie, le tutoyant tout d’un coup comme un marchand de volailles. Rien à vendre chez les Coulevaï, et même aujourd’hui qu’on divorce… Hé ! toi, le garde… qu’est-ce qu’on m’a raconté ? il paraît que le nouveau marié, lui aussi, il a le sac ?

— Il l’a, répondait le serviteur.

— Je les ai rencontrés à Biarritz, dit un gentleman de la région. Il avait une voiture… de roi… C’est un fils à papa. Noblesse du pape, mais grosse galette.

— Amène-le déjeuner, ton nouveau patron, bouffonna l’hôtelier, s’adressant derechef à Nicolaï. Je lui ferai payer le prix fort.