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L’HOMME À L’HISPANO

suite d’un fils de famille, mort quelques mois plus tard aux environs de Marrakech. Depuis, elle faisait fortune et se vendait avec simplicité en attendant d’avoir de quoi se marier quand elle retournerait au pays. Elle accueillit l’Anglais avec une déférence complaisante et s’apprêtait à lui obéir de son mieux. Mais il la regarda et brusquement il songea que ce corps majestueux n’était pas fait pour le distraire. Il l’interrogea pour connaître si elle avait vécu à Biarritz. Elle lui répondit qu’elle avait servi chez des personnes qu’elle nomma. C’était des cousins des Coulevaï. Il l’interrogea derechef et, sans transition, il l’injuria. Il lui dit que toutes les femmes étaient insensées, qu’il les méprisait, et qu’il admirait un bouvier qu’il avait vu reconduire la sienne à la maison à grand renfort de pied au cul. Il ajouta que tout le sexe ne méritait pas d’occuper un homme, à moins qu’il ne fût, cet homme, tout à fait gâteux. Il commanda à la Basquaise de lui verser un verre de fine. Nue et tremblante, elle servit la liqueur. Il lui jeta cinq cents francs et s’en alla rempli d’une colère incompréhensible. Il était déjà sur le bateau et pestait d’attendre l’appareillage, qu’elle demeurait encore ahurie de l’incohérence de son client. Enfin, il lui sembla qu’elle avait compris et, le soir, elle raconta l’histoire à un colon de ses fidèles :

— Mon petit, finissait-elle, ce type-là, il en tient ! Sûr qu’il est cocu, — et qu’il le sait.