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POÉSIES

« Comment q’un peu soie chenus,
» Dame, di-je, dont j’ai anoi,
» Assés bien je vous recognoi,
» Car je vous vi, jà fu le tamps ;
» Et encores sui bien sentans
» Les paroles qui de vo bouche
» Issirent, qui est belle et douce. »
« T’en souvient-il ? » — « Oil, par m’ame ! »
— « Di que ce fu. » — « Volentiers, dame,
» Vous me donnastes don moult riche,
» Quant coer gai, amoureus et friche
» Aroie-je tout mon vivant,
» Et encores trop plus avant
» Que de dame humble, gaie et lie
» De tous biens faire appareillie
» Seroie fort énamourés.
» Or ai-je vos dons savourés.
» Non de tous, mès d’aucuns me loe. »
— « Compains, dist-elle, que je loe
» Ce dont tu te plains, je t’en pri. »
— « Volentiers ! Je qui merci cri,
» Et l’ai fait ensi que tout dis.
» Je n’en ai riens el qu’escondis
» Dangiers et refus, jours et nuis,
» Painnes, et assaus et anuis.
» Ne sçai comment les ai portés ;
» Mès je me sui seul deportés
» À estre loyal et entiers
» Et que de véoir volentiers
» Ma dame, à qui j’ai tout donné.