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DE JEAN FROISSART.

Pour ce le vodrai avant mettre,
Et moi liement entremettre
De quant qu’à ma memoire sent
Dou temps passé et dou present.
Aussi nature qui m’a fet,
Créé et nouri de son fet,
Et qui encor de jour en jour
Me preste loisir et sejour
Que de ce que j’ai je m’avise
Et ce que je sçai je devise,
Se plainderoit, où que je soie,
De moi voir, se je me cessoie ;
Et bien auroit raison et cause.
Nulle escusance je n’i cause ;
Car pour ce m’a elle ordonné,
Sens et entendement donné
Que je remonstre en plain ventele
Ce que je sçai, dont je me mele,
C’est que de faire beaus dittiers
Qu’on list et qu’on voit volontiers,
Espécialment toutes gens
Qui ont les coers discrès et gens.
Ce n’est mie pour les villains ;
Car, ensi m’ayt sains Gillains !
Que je m’avroie assés plus chier
À taire et en requoi mucier
Que jà villains evist dou mien
Chose qui li fesist nul bien.
Ce n’est fors que pour les jolis
Qui prendent solas et delis