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DE JEAN FROISSART.

En grant peril.
Trop me voelt estre secretaire
Fortune, qui a tous voelt plaire ;
Se j’ai mesdit je m’en voeil taire.
De li vient-il.
Trop sont ses las fors et soubtil
Prendre me voelt, je croi, au bril ;
Elle m’a mis en grant péril
De moi deffaire,
Mès quoi qu’elle me tienne vil,
Ma dame à le coer si gentil
Que jà ne m’en vodra nennil
Chose contraire.

Aussi j’escuse le coer mien
Qu’onques ni pensai mal engien.
Amours le scet, qui cognoist bien
Ce que je pense,
Comment j’aimme sus toute rien
Ma dame, car c’est tout mon bien
Mon souverain Dieu terriien
Tant qu’en loquensce
C’est m’onnour, c’est ma reverensce ;
C’est ma très plaisant residensce
Où je prenc confort et prudensce
Sans nul moyen ;
Si le voeil en obediensce
Servir par bonne diligensce
Et recevoir en pascience
Le plaisir sien.