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DE JEAN FROISSART.

Je fui lies de son salut prendre,
Et tous près aussi de lui rendre,
Et puis li dis : « Chiers sires douls,
» Ne vous cognois ; qui estes vous ?
» Et ensi vous me cognissiés
» Que dont que nouri m’euissiés. »
Lors me dist : « Bien te doi cognestre,
» Car puis quatre ans après ton nestre
» En gouvernance t’ai éu,
» Et si ne m’as pas cognéu.
» Si sui-je assès bien renommés,
» Car Mercurius sui nommés ;
» Et ces Dames que tu vois là
» Sont Juno, Venus et Pala ;
» D’armes, d’amours et de richesces
» Sont les souverainnes Déesses ;
» Mès ores sont un peu en tensce ;
» Car Paris rendi jà sentensce
» Que la pomme d’or devoit estre
» À Venus, que tu vois sus destre.
» À deus dames pas ne souffist
» Le jugement que Paris fist ;
» Mès dient que par ignorance
» Et par petite cognissance
» Acorda la pomme à Venus.
» Juno en parle plus que nuls ;
» Car, se à li l’euist donnée,
» Elle avoit jà tout ordonné
» Qu’il euist éu par puissance
» Des Grigois très belle vengeance.