Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/203

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
DE JEAN FROISSART.

Que Diex gart et de corps et d’ame !
Amours et elle m’ont apris
Bien voie de monter en pris ;
Et se je n’ai pas retenu
Tout le bien dont il m’ont tenu,
À moi le blasme et non à euls,
Car grasces en doi rendre à ceuls
Dont proufis me vient et honnours,
C’est à ma dame et à Amours.
Moult convegnable en est l’usance ;
Or ai-je un petit d’escusance
De ce que lors trop jones ère
Et de trop ignorans manière.
Et moult me trouva foible et tendre
Amours, quant si hault me fist tendre
Comme en amer ; mès l’amour moie
De quoi lors par amours amoie
Tant qu’en enfance, pour ce fait,
Ne me portoit gaires d’effait.
Espoir, s’il m’euist plus viel pris,
J’euisse été trop mieuls apris,
Et cogneuisse mieulz son nom ;
Que je ne face, et espoir non ;
Car on dit : Qui voelt la saucelle
Ployer aise, il le prent vregelle.
Aussi Amours me prist ou ploi
De mon droit jouvent pour ce ploi,
Tout ensi qu’il me voelt ployer,
Car mieuls ne me voeil employer.
Mès quel éage, au dire voir,