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Méliador

Se li sont fortes et pesandes
Les pensées de fine amour ;
Souvent dist, entre nuit et jour,
19460 Quant les pensées vont au cor :
« Ha, biau frere Melyador,
« Mar vous vi si bien tournoiier,
« Ne vostre espée menoiier ! »
Tout ce record’ on a son pere
19465 Et a la ducoise sa mere,
Et il sallent tantost avant
Qui li remettent au devant :
« Ma bielle fille, apaisiés vous.
« Vous savés comment entre nous
19470 « Est or une ordenance prise,
« La quele grandement je prise,
« Car temprement orons nouvelles
« Qui nous seront bonnes et belles. »
— « Diex y ait part ! » dist Phenonée.
19475 La demeure en celle pensée,
Qui est moult merancolieuse f. 143 d
Et trop durement perilleuse.
Ce dient tout cil qui le voient,
Qui encores pas ne savoient
19480 Les dolours qui sont dedentrainnes ;
Mais il voient bien les foraines,
Comment Phenonée amagrist
Et de sa couleur amenrist,
Qui soloit estre de bon taint,
19485 Et maintenant elle s’estaint.
Ce sont coses moult desplaisans
A signeur qui aiment enfant [1]
Et qui n’ont o yaus c’une fille
Jone, gratïeuse et gentille,
19490 Dont tout resjoÿ estre doient,
Quant ensi amenrir le voient
Et languir en si dure painne

  1. 19487 signeur, B signeurs ; — enfant, B enfans.