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Analyse de Méliador

tain rondeau amoureux, traitant du même objet que le virelai. Après qu’elle s’est exécutée et pour obéir à la requête de Sébille, Sagremor chante à son tour un virelai de sa composition qui lui vaut d’agréables compliments. Mais aussitôt la belle disparaît et l’émotion que ressent alors le jeune prince est si forte qu’il s’éveille subitement. La vue de ce qui l’entoure le ramène à la réalité et il se prend à regretter que le songe qu’on vient de dire ne soit qu’un leurre. Privé de ses armes et de son cheval, n’ayant plus même auprès de lui le cerf qui l’a conduit en ces lieux, il lui serait impossible de repousser une attaque quelconque. Tandis qu’il se livre à ces tristes réflexions, Sagremor voit devant lui trois dames d’une grande distinction et d’une beauté parfaite. Toutes trois vêtues de blanc et se tenant joyeusement par le doigt, elles adressent aimablement la parole au chevalier, lui demandant comment il a pénétré dans leur verger. Sagremor raconte alors de point en point ce qui lui est advenu et les trois dames délibèrent ensuite au sujet du damoiseau qu’elles ont ravi et transporté dans leur demeure. Il importe en effet qu’on sache que les dames qui ont enlevé Sagremor ne sont autres que des nymphes, suivantes de Diane[1]. Il en sera encore parlé plus loin, mais le moment est venu de dire la fin de la quête, objet principal du présent poème (v. 28831).

Vers le terme de la cinquième et dernière année de la quête, tous les chevaliers qui y ont pris part viennent d’Irlande, de Galles et de Northumberland à Carlion, afin de comparaître devant les douze arbitres choisis dès le début. Les juges, qui se livrent à une enquête impartiale, tiennent en grande estime Agamanor, Gratien, Dagoriset, Lucien, Feughin, Savare et une dizaine d’autres chevaliers ; mais, en attendant le tournoi final, ils leur préfèrent encore le vainqueur de Camel, que la voix publique désigne déjà comme le triomphateur probable. Le roi de Bretagne et

  1. Ou mieux des fées (cf. vers 30343).