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sonne n’ait rien à donner ni rien à recevoir, où tous soient courbés sous le même niveau, attachés au même joug, et sacrifiés corps et âme, intelligence et force, à l’État, reconnaîtrons-nous sous un tel régime ce libre élan du cœur qu’on appelle la charité ? La charité toute seule ne peut pas servir de base à un gouvernement, à un ordre social, et là où elle est forcée, elle se change en servitude. Le christianisme et le communisme, loin de se confondre, sont donc complètement opposés l’un à l’autre. Le premier se fonde sur l’amour et par conséquent sur la liberté, le second sur la contrainte ; le premier commande la résignation, le sacrifice ; le second, la spoliation. Il n’y a, en effet, aucun ménagement à garder au point de vue de ce dernier système. Si la propriété individuelle est illégitime, ou, comme on l’a dit plus crûment dans ces derniers temps, si la propriété est un vol, il ne faut pas hésiter à la détruire ; il faut que les victimes de cette antique iniquité obtiennent une prompte réparation ; et c’est cette œuvre de confiscation et de violence qui serait le fruit le plus accompli de la charité chrétienne !

Il y a dans le christianisme un autre point de vue auquel nous sommes obligés de nous arrêter. La morale de l’Évangile ne se renferme pas toujours dans les conditions de l’humanité. Fondée, comme je l’ai dit plus haut, sur le seul principe de l’amour et ne voyant que Dieu qui soit digne d’être aimé, elle semble ou-