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DÉDU — 347 DÉFI dégagés par nous à la suite d’observations, d’ex- périences, de comparaisons, d’abstractions nom- breuses; ils sont toujours relatifs aune réalisation donnée, et sont indéfiniment perfectibles. Ce sont les principes inductifs ou obtenus par voie d’in- duction; par exemple : Les volumes des gaz sont en raison inverse des pressions. Or, la déduction emploie ces deux sortes de principes généraux, et les connaissances qu’elle tire de ces principes sont de la même valeur que les principes d’où elle les tire. Si elle part des principes absolus et nécessaires, elle en fait sor- tir des conséquences d’une certitude absolue, complète et invariable comme ces principes eux-mêmes : elle est le procédé qui constitue les sciences de raisonnement pur, comme les mathématiques, où les vérités acquises sont à jamais invariables. « Il est évident, dit Aristote {Dem. Analyt., liv. I, ch. vin), que si les prin- cipes d’où on tire la conclusion sont universels, il y a nécessité que la conclusion soit une vérité éternelle. » Si la déduction part des variétés gé- nérales obtenues par voie d’induction, les vérités qu’elle en fait sortir sont marquées du même caractère de contingence, de relativité et de per- fectibilité indéfinie ; mais la valeur de la consé- quence n’en est pas infirmée pour cela. Tant que subsisteront les lois de l’univers et l’ordre qui a permis de dégager ces principes, ces principes seront vrais, et les conséquences vraies comme les principes. « Quant à la démonstration et à la science du cours ordinaire des choses, évidem- ment elles sont éternelles dans l’essence de ces choses » {vin supra). Et c’est là ce qui permet de se servir de la déduction pour appliquer les vérités générales obtenues par induction, et même pour les vérifier et s’assurer si elles sont exactes et si les faits s’accordent avec les lois que nous avons cru découvrir. En effet, d’après la manière dont sont formées les vérités induc- tives, tout ce qui est vrai du genre doit être vrai de l’individu, puisque le genre ne contient que des qualités communes. Or, 1° ou il n’y a pas d’ordre dans l’univers, ou par la déduction nous pouvons tirer des principes généraux que four- nit l’induction des applications qui constituent les arts: 2° si la loi de tel genre est légitimement formulée, tel individu de ce genre devra y être soumis. On expérimente sur cette déduction, et si le résultat est en contradiction avec la loi, c’est une preuve que cette loi n’est point celle du genre et que la généralisation qui l’a formu- lée est à recommencer. Ainsi, dans la science, comme dans les applications de la vie, l’induc- tion et la déduction se supposent l’une l’autre, et sont dons un rapport tel que la seconde ne peut exister sans la première, et que la première peut et doit être appliquée et vérifiée par le moyen de la seconde. L’induction doit sa légitimité et sa puissance irrésistible à ce principe nécessaire et absolu sur lequel elle repose : Dans les mêmes cir- coiislanceSj et dans les mêmes substances, les m ’mes effets résultent des mêmes causes. De même, la déduction doit la sienne à ceux de ces mêmes principes qui lui servent de base et de fondement. Quand elle conclut l’identité des effets et des phénomènes, de l’identité de cause et de substance, elle s’appuie sur le même prin- cipe que l’induction, en l’appliquant à sa ma- nière. Quand elle prend, pour arriver à sa con- clusion, un intermédiaire entre l’objet donné et la qualité à découvrir, et que. du rapport de convenance qui unit cet intermédiaire d’un côté à l’objet et de l’autre à la qualité cherchée, elle conclut le même rapport de convenance entre l’objet et la qualité, elle n’est qu’une application de cet axiome : Deux choses comparées à une troisième, et trouvées semblables à cette troi- sième, sont semblables entre elles, axiome qu’on pourrait appeler principe de déduction, comme on appelle l’autre principe d’induction. Ainsi, les deux procédés inductif et déductif, et les vérités qu’ils nous donnent, reposent sur les principes premiers qu’ils supposent et des- quels se tire, même à notre insu, par une né- cessité de notre constitution intellectuelle, toute l’autorité que nous leur donnons. Il faut bien qu’il en soit ainsi, pour qu’il y ait quelque chose de fixe et de stable dans la croyance humaine. S’il n’y avait pas quelque chose de primitif, d’inconditionnel et d’absolu, à quoi le raisonne- ment se référât et qui lui servît de base, quel- que chose, en un mot, de nécessaire, qui brillât de tout l’éclat d’une évidence propre, constante, ineffaçable, toute la chaîne des vérités inducti- ves et déductives flotterait en l’air et ne tien- drait à rien. Dans sa plus grande simplicité, la déduction suppose au moins trois idées : l’idée du principe en général, l’idée des données, et l’idée déduite ou sortant nécessairement des deux premières. Dans ce cas il n’y a qu’un genre et qu’une don- née intermédiaire ; mais il pourrait y en avoir une série plus ou moins longue, sans que la na- ture de l’opération changeât en rien. Un genre peut rentrer comme espèce dans un genre plus élevé, mais toujours ce qui est affirmé en gé- néral pourra être affirmé du particulier qu’il comprend, et, s’il est vrai de dire : deux choses égales à une troisième sont égales entre elles ; il est aussi vrai d’ajouter que si l’une des trois est égale à une quatrième, elles sont toutes qua- tre égales entre elles* et ainsi de suite. Les règles de la dtduction se tirent de la na- ture de cette opération et du but qu’elle se pro- pose. Comme la déduction établit un rapproche- ment entre un principe général connu et déter- miné et les données d’un objet particulier à déterminer dans ce qu’il a d’inconnu, il est né- cessaire, 1° de vérifier le principe général, c’est- à-dire de voir s’il est un principe légitimement acquis, et d’en déterminer exactement la nature et la portée ; 2" d’examiner les données de l’objet particulier, de s’assurer qu’elles suffisent pour le rattacher au principe général, afin de ne point s’exposer à ne pas aller du même au même, et à rapporter au genre connu un individu qui, mieux étudié dans ses données, ne saurait lui être as- similé. Quand on considère la déduction dans sa forme, dans le syllogisme, on ajoute aux règles précé- dentes celles qu’exige l’emploi des formes ver- bales. Le mot déduction n’a été employé dans le sens que lui donne actuellement la philosophie, ni par les Latins, ni par les scolastiques. Les lexi- cographes ne le donnent pas, et on ne le trouve que dans la dernière édition (1835) du Diction- naire de l’Académie. Cela vient de ce que c’est dans les derniers temps seulement que cette opération intellectuelle a été distinguée de sa forme, et désignée par un nom qui marque ses rapports avec l’induction. Précédemment elle n’avait été étudiée que dans la forme syllogisti- que. Consultez : Aristote, Premiers Analytiques ; — Logique de Port-Royal ; — Logique de Bos- suet; — Waddington, Essais de logique; — Stuart Mill, Logique jnductive et déductive, trad. en français par L. Peisse. Voy. Syllogisme, Mé- thode. J- D. J.

DÉFINITION. Proposition par laquelle on détermine soit le sens d’un mot, soit la nature d’une chose.