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L’âme n’est ni partiellement dans chaque partie du corps, ni tout entière dans le corps tout entier ; mais elle réside dans le cœur. C’est le cœur qui entre le premier en fonction dans l’œuf fécondé, et qui est le point le plus important de tout le corps, le principe des artères et des veines, et même celui des nerfs ; car les artères ont déjà des téguments nerveux, et se rendent du cœur au cerveau. C’est pourquoi le cœur est le siége des sensations, comme le prouve invinciblement l’influence des passions sur cet organe (Ibid., liv. V, quest. 7).

Césalpin repoussait la magie et la sorcellerie, comme des extravagances ou des impostures. Ses opinions se répandirent, non-seulement en Italie, mais encore en Allemagne, à tel point que, selon les paroles de Taurel, son adversaire, elles y étaient en plus grande considération que les oracles d’Apollon parmi les Grecs. Parker disait aussi de lui qu’il avait été le premier et peut-être le dernier des modernes qui ait compris Aristote. Césalpin exposait sans restriction la doctrine de ce philosophe ou ce qu’il regardait comme tel, laissant à la théologie le soin d’en réfuter les erreurs. On a cru voir en lui un précurseur de Spinoza et même un athée. Il mourut en 1603. — Brucker a donné une analyse de la doctrine de Césalpin au tome VI de son Histoire de la Philosophie, p. 723 et suiv. On peut consulter aussi un excellent article du Dictionnaire historique de Bayle et l’Histoire de la Philosophie de M. Rixner. Les ouvrages philosophiques de Césalpin, aujourd’hui fort rares, sont : Quæstiones peripateticæ, in-f°, Venise, 1571 ; — Dæmonum investigatio peripatetica, in-4, ib., 1593.J. T.

CESARE. Terme mnémonique de convention par lequel les logiciens désignaient un des modes de la seconde figure du syllogisme.Vroy. la Logique de Port-Royal, 3e partie, et l’article Syllogisme.

CHÆRÉMON vivait dans le ier siècle de l’ère chrétienne. Suidas lui attribue une Histoire d’Égypte et un ouvrage intitulé Hiéroglyphiques. Porphyre (de Abstin., lib. IV) nous apprend qu’il professait le stoïcisme : ce qui porte à croire qu’il est ce même Chærémon contre lequel il existe une épigramme de Martial (liv. XI, épigr. 56). On le croit aussi le même que l’auteur d’un traité sur les comètes, cité par Sénèque (Quœst. nat., lib. VII, c. v) sous le nom de Charimander. X.

CHALDÉENS (Sagesse des). Tout le monde connaît l’antique renommée de la sagesse chaldéenne et de la science des mages ; on sait quel prestige s’attachait autrefois à ces noms pleins de mystères, quelle autorité ils avaient surtout à l’école d’Alexandrie, où l’Orient et la Grèce ont commencé, pour la première fois, à se mêler et à se connaître. Mais lorsqu’on veut savoir sur quoi se fonde cette gloire séculaire ; lorsqu’on entreprend d’en recueillir les titres et de les examiner à la lumière d’une saine critique, alors on ne trouve plus que ténèbres et confusion. Quelques passages obscurs des prophètes hébreux, torturés en mille sens par les commentateurs, quelques indications superficielles de Strabon et de Diodore de Sicile, quelques lignes de Sextus Empiricus, de Cicéron, de Lactance et d’Eusèbe, telles sont à peu près toutes les traces qui nous restent de la civilisation d’un immense empire et de cette sagesse tant vantée de laquelle, disait-on, Thalès, Pythagore, Démocrite et Platon lui-même se sont nourris et inspirés. Nous nous garderons de citer comme des autorités incontestables les philosophes d’Alexandrie, comme Philon le Juif, Porphyre, Jamblique, saint Clément, et d’accueillir sans réserve les opinions qu’ils nous ont transmises sous le titre pompeux d’Oracles chaldéens (Λόγια χαλδαῖκά). Ces prétendus oracles ont une ressemblance trop évidente avec les doctrines professées par les disciples d’Ammonius et de Plotin, pour qu’il soit permis de croire à leur authenticité. Puis il y a lieu de s’étonner que, remontant jusqu’à Zoroastre, ils soient restés entièrement inconnus jusqu’à cette époque, malheureusement coupable de plus d’un mensonge. Nous accorderions volontiers plus de crédit aux fragments que nous avons conservés de Bérose (Fabricius, Bibliothèque grecque, t. XIV, p. 175 et suiv.), s’ils contenaient autre chose que des faits purement historiques entremêlés de fables populaires. Mais, si faibles que soient les documents demeurés en notre pouvoir, ils suffisent pour autoriser en nous la conviction que la sagesse chaldéenne, à part certaines connaissances astronomiques assez bornées, n’a jamais été qu’un système religieux enseigné au seul nom des traditions sacerdotales, et non moins éloigné que le paganisme grec de la véritable science philosophique.

D’abord il faut prendre garde de confondre les Chaldéens avec les Perses, bien que ces deux peuples aient été réunis plus tard en une seule nation, par les armes de Cyrus et la réforme religieuse de Zoroastre, accomplie environ cinq siècles avant notre ère. La civilisation des Perses est plus rapprochée de nous, quoique très-éloignée encore relativement à celle des Romains et des Grecs ; elle nous a laissé des traces plus nombreuses et plus certaines, et un monument du plus haut prix rapporté de l’Orient pendant le dernier siècle : nous voulons parler du Zend-Avesta (voy. le mot Perses). De la civilisation chaldéenne il ne nous reste que les faibles et obscurs débris dont nous avons parlé tout à l’heure.

Mais au sein même de l’empire d’Assyrie, séparé de celui des Perses, il faut distinguer encore les Chaldéens proprement dits, la race sacerdotale dépositaire de toutes les connaissances que l’on possédait alors, de toutes les traditions religieuses et historiques de la nature, et que l’Écriture sainte désigne sous le nom de Chasdim. C’étaient probablement les descendants d’un peuple plus ancien encore, lequel, après avoir fait la conquête de la Babylonie, y avait apporté sa propre civilisation, ses propres croyances, dont il garda le dépôt au milieu des races ignorantes soumises à son joug. Leur rôle et leur position étaient à peu près les mêmes que ceux des prêtres égyptiens. Ils étaient exempts de toute charge ; ils avaient leur territoire particulier au milieu de l’empire, et se gouvernaient d’après leurs propres lois. Leur langue, comme nous le voyons par le livre de Daniel (ch. ii, ꝟ. 4) n’était point celle du peuple, et ils possédaient, outre des traditions orales, des monuments écrits dont eux seuls connaissaient le sens (ubi supra, ch. i, ꝟ. 4). Parmi les fonctions de leur ministère, il faut compter celle de prédire l’avenir par l’observation des astres, d’expliquer les visions, les songes et tous les autres prodiges dont l’imagination des hommes était sans cesse effrayée pendant ces temps de superstition. C’est à eux que s’adresse le roi Nabucnodonosor pour avoir le sens des visions terribles qui ont troublé son sommeil (ubi supra, ch. xi, ꝟ. 2). C’est à eux aussi que le roi, Balthazar demande l’explication des trois mots mystérieux tracés par une main inconnue sur les murs de son palais (ubi supra, ch. v, ꝟ 5-7). A côté des Chaldéens ou Chasdim, l’Écriture nous montre encore trois autres classes de sages qu’elle désigne sous les