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dans toute sa sévérité, par les théra­peutes. Aux yeux de ces hommes, les vertus ordi­naires et sociales, la moralité proprement dite, n’était qu’une préparation aux vertus solitaires de la vie contemplative, regardée comme le terme de la perfection humaine.

Si l’on juge la morale ascétique d’un point de vue purement relatif, comme un contre-poids nécessaire à des excès d’un autre genre, elle mérite assurément notre indulgence et même notre respect. Dans les temps de mollesse et de désordre, elle vient rappeler à l’homme le sou­venir de sa force et de son principe spirituel qu’elle met à nu par les plus héroïques résis­tances contre les lois du corps ; elle exagère le néant des choses de la terre, les vanités et les misères de la vie, pour élever sa pensée vers les régions de l’idéal et de l’infini. Mais, à la consi­dérer en elle-même et dans sa valeur absolue, comme le dernier terme de la moralité humaine ou comme le but même de la vie, elle renferme des conséquences aussi dangereuses peut-être ue celles du système diamétralement opposé ; e plus, elle est en contradiction avec son pro­pre principe, car elle veut la fin sans vouloir les moyens ; elle appelle la perfection de l’homme et repousse les conditions sans lesquelles il est impossible d’y atteindre. En effet, ce n’est pas par lui seul, mais c’est au sein de la société, grâce à son concours et à ses institutions, que l’homme peut arriver au complet développement, à la conscience de son être, à la connaissance parfaite de sa nature, de son principe et de ses devoirs. Donc, le perfectionnement de l’état social est tout à fait inséparable de notre perfectionnement individuel, sous quelque point de vue qu’on l’en­visage. Mais vivre dans la société, c’est vivre pour elle, c’est prendre part à ses biens comme à ses maux, c’est veiller à ses intérêts et défen­dre son existence, en un mot, c’est tout le con­traire de la vie ascétique. En second lieu, si l’état social est pour l’âme qui aspire à la perfec­tion un mal et un danger ; si l’abandon, les misères et les souffrances sont un bien, une pu­rification nécessaire, quelle pitié restera-t-il dans nos cœurs pour les douleurs de nos semblables, quel devoir nous commandera de les soulager, quelle raison aurons-nous d’interrompre nos su­blimes méditations pour rentrer dans les impu­retés de ce monde ? L’ascétisme, conséquent avec lui-même, doit donc aboutir à l’isolement de l’âme comme à celui du corps ; et cet isolement, pour être commandé par les intentions les plus pures, n’en mérite pas moins le nom d’égoïsme. Enfin, si, comme le supposent les apologistes de la vie ascétique, notre existence ici-bas est une déchéance, notre corps une prison, et tous les besoins qui en dépendent autant ae souillures, n’aurions-nous pas le droit d’accuser la bonté et l’intelligence divines, qui, pour fournir à l’homme un lieu d’épreuves, auraient tout exprès créé le mal ? Oui, sans doute, la vie est une épreuve ; mais, pour la soutenir dignement, il faut que nous développions tous les germes qu’une main divine a déposés en nous, que nous comprenions toute la grandeur et la beauté de la nature inté­rieure, que nous acceptions tous les devoirs que nous avons à remplir envers les autres et envers nous-mêmes, qu’enfin la création de l’homme soit regardee comme le chef-d’œuvre de Dieu. Voy. Ch.-L. Schmidt, de Asceseos fine el origine dissert., in-4, Caris., 1830.—Jean-B. Buddeus, de Κάόαρσει Pylhagorico-Platonica, in-4, Halle, 1701 ; et de 5Ασ/.ήσει philosophica, dans son recueil intitulé : Analecta hisloriœphilosophice, in-8, Halle, 1706 et 1724.

ASCLEPIADE de PiiuoNTE. Philosophe de l’école d’Ërétrie ; il était disciple de Stilpon et vécut au ive siècle avant J. C., connu surtout par son étroite intimité avec Ménédème, le fon­dateur de cette école : voy. Diogène Laërce, liv. II, ch. xvii. Il y eut aussi un neo-platonicien du même nom qui fut disciple de Proclus ; c’est tout ce qu’on sait de lui.

ASCLÉPIGÉNIE. Fille du néo-platonicien Plu­tarque d’Athènes, sœur d’Hiérius et femme d’Archiade ; complètement initiée à tous les mystères de la philosophie néo-platonicienne, elle put les enseigner à Proclus quand celui-ci vint à Athènes pour y suivre les leçons de Plutarque. Voy. Pro­clus et Plutarque cI’Athènes.

ASCLEPIODOTE. Néo-platonicien ; tout ce que nous savons de lui, c’est qu’il fut disciple de Proclus.

ASCLEPIUS de Tralles. Un des plus anciens commentateurs d’Aristote, disciple d’Ammonius, fils d’Hermias, vivait au vie siècle après J. C. ; ses travaux n’ont pas été conservés.

ASPASIUS. Ancien commentateur d’Aristote, dont les écrits ne sont pas arrivés jusqu’à nous.

ASSENTIMENT. On appelle ainsi l’acte par lequel l’esprit reconnaît pour vraie, soit une proposition, soit une perception ou une idée. De là résulte que l’assentiment fait nécessairement partie du jugement ; car, si l’on retranche de cette dernière opération l’acte par lequel j’af­firme ou je nie, par lequel je reconnais qu’une chose est ou qu’elle n’est pas, soit absolument, soit par rapport à une autre, il ne restera plus qu’une simple conception sans valeur logique, qu’une proposition qu’il faut examiner avant de l’admettre. Le même acte est nécessaire à la perception, qui peut n’être pour nous qu’une simple apparence tant que l’esprit ne l’a pas en lui-même reconnue pour vraie. C’est ainsi qu’il a existé des philosophes qui ont révoqué en doute la réalité des objets perçus, ou qui ont cru né­cessaire de s’en convaincre par le raisonnement. L’assentiment est spontané ou réfléchi, libre ou nécessaire. Il est libre quand il n’est pas imposé par l’évidence, nécessaire quand je ne puis le refuser sans me mettre en contradiction avec moi-même. Les stoïciens sont les premiers, et peut-être les seuls philosophes de l’antiquité, qui aient donné au fait dont nous nous occupons une place importante dans la théorie de la connais­sance : tout en admettant, avec l’école sensualiste, que la plupart de nos idées viennent du dehors, ils ne croyaient pas que les images pu­rement sensibles (φαντασίαι) puissent être con­verties en connaissances réelles sans un acte spontané de l’esprit, qui n’est pas autre chose que l’assentiment (συγχατά0=σι : ).

ASSERTOIRE OU ASSERTORIQUE (assertorisch, de asserere). Mot forgé par Kant pour dé­signer les jugements qui peuvent être l’objet d une simple assertion à laquelle ne se joint aucune idée de nécessité. Leur place est entre les jugements problématiques et apodictiques. Voy. Kant, Critique de la 7’aison pure, Logique transcendantale, analytique des concepts.

ASSOCIATION DES IDÉES. Quand un voyaeur parcourt les ruines d’Athènes, la campagne e Rome, les champs de Pharsale ou de Mara­thon, la vue de ces lieux illustres éveille dans son esprit le souvenir des grands hommes qui y ont vécu et des événements qui s’y sont passés. Lorsqu’un philosophe, un astronome ou un phy­sicien entendent prononcer les noms de Descar­tes. de Copernic ou de Galilée, leur pensée aus­sitôt se reporte vers les découvertes qui sont dues à ces immortels génies. Le portrait d’un ami ou d’un parent que nous avons perdu a-t-il frappe nos regards, les vertus et l’affection de cette personne