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que Pyrrhon devait fonder, et qui compte dans son sein Ænésidème, Agrippa et Sextus Empiricus. Lui-même poussait le scepticisme à ses dernières limites, puisque, au rapport de Diogène, il avait coutume de dire « qu’il ne savait même pas qu’il ne savait rien ».

Disciple de Démocrite ou de Nessus, et maître d’Anaxarque, qui fut, comme on sait, contemporain d’Alexandre le Grand, qu’il suivit en Asie, Métrodore de Chio dut vivre entre l’an 420 et l’an 337 avant l’ère chrétienne. C. M.


MÉTRODORE de Lampsaque. Diogène Laërce mentionne ce philosophe parmi les plus célèbres disciples d’Épicure (liv. X), et il ajoute que, parmi les amis d’Épicure, Métrodore fut le premier, et qu’il ne s’en sépara jamais, hormis un séjour de six mois qu’il alla faire dans son pays, et d’où il revint trouver bon maître.

Plusieurs historiens, entre autres Jonsius (Script. hist. philosoph., lib. I, c. xx, estiment que Métrodore était originaire d’Athènes, mais qu’il passa pour être né à Lampsaque, à cause du séjour qu’il y fit, et que ce fut en cette ville qu’il connut Épicure. Mais Strabon (liv. XIII) et Diogène Laërce disent très-positivement qu’il eut Lampsaque pour patrie. Ce dernier historien lui donne pour frère Timocrate, homme, dit-il, d’un esprit brouillon, qui fut aussi un des disciples d’Épicure, mais qui devint ensuite son ennemi. C’est ce Timocrate qui, au rapport de Diogène, s’attacha, dans ses livres intitulés de la Joie ou du Plaisir, à calomnier les mœurs de son maître et même celles de son frère.

Diogène, se fondant sur le témoignage d’Épicure, nous représente Métrodore comme un très-honnête homme, et comme un caractère d’une inébranlable fermeté, intrépide même contre les atteintes de la mort. Il mourut dans la cinquantième année de son âge, sept ans avant Épicure. Celui-ci, en plusieurs endroits de son testament, rapporté par Diogène Laërce, parle du soin qu’il veut qu’on prenne des enfants laissés par Métrodore : « Amynomaque et Timocrate, dit-il, prendront soin de l’éducation d’Épicure, fils de Métrodore, et des fils de Polyæne, tant qu’ils demeureront ensemble chez Hermachus, et qu’ils prendront ses leçons. Je veux aussi que la fille de Métrodore soit sous leur conduite, et que, lorsqu’elle sera en âge d’être mariée, elle épouse celui d’entre les philosophes qu’Hermachus lui aura choisi. Je lui recommande d’être modeste, et d’obéir entièrement à Hermachus. » Parmi les nombreux écrits d’Épicure, cinq avaient pour titre Métrodore, et un autre ouvrage, sous le titre d’Euryloque, lui était également dédié. Ces circonstances, réunies aux dispositions testamentaires que nous venons de rapporter, témoignent du profond attachement d’Épicure pour celui qui fut son disciple et son ami.

Métrodore avait composé plusieurs ouvrages, dont voici les titres rapportés par Diogène Laërce : Contre les médecins, en trois livres ; — des Sens, à Timocrate ; — de la Magnanimité ; — de la Maladie d’Épicure ; — Contre les dialecticiens ; — Contre les sophistes ; — du Chemin qui conduit à la sagesse ; — de la Vicissitude des choses ; — des Richesses ; — Contre Démocrite ; — de la Noblesse. C’est probablement dans l’un de ces écrits que se trouvait cette phrase, rapportée par Sextus Empiricus (Adv. Mathem., lib. I), et attribuée par lui à Métrodore : Μηδεμίαν άλλην πραγματείαν ἐμπειρίαν τò ἐαΰτης τέλον συνορᾷν, ἣ φιλοσογΐαν, phrase qui, à travers son obscurité, mal dissipée par Gassendi, paraît vouloir dire « qu’aucune autre science que la philosophie n’a devant elle un but pratique ». Or, ce but pratique, quel est-il pour la philosophie épicurienne ?


Le bonheur, à la condition de la tranquillité de l’âme.

C. M.


MÉTRODORE de Stratonice, qu’il ne faut pas confondre avec le précédent, fut aussi un des disciples de l’école épicurienne. Mais, à la différence de Métrodore de Lampsaque, qui vécut et mourut dans l’intimité de son maître et fidèle à toutes ses doctrines, Métrodore de Stratonice abandonna l’école d’Épicure pour la nouvelle Académie. C’est ce qui résulte du témoignage de Diogène Laërce, dans sa biographie d’Épicure : « Tous les disciples d’Épicure, dit-il, restèrent dans sa voie, grâce au charme de sa doctrine, qui avait, pour ainsi dire, la douceur du chant des Sirènes. Il n’y eut que le seul Métrodore de Stratonice qui suivit le parti de Carnéade. » Ce peu de lignes de Diogène Laërce sont le seul document qui nous reste sur le philosophe dont il s’agit. La mention du nom de Carnéade, dans ce texte de Diogène Laërce, vient fixer l’époque à laquelle vécut Métrodore de Stratonice. Carnéade de Cyrène, fondateur de la troisième Académie, était né vers 219, et mourut en 131. Métrodore de Stratonice, qui fut son contemporain, et qui devint son disciple, n’appartint donc pas, comme Métrodore de Lampsaque, à la première époque de la philosophie épicurienne, attendu que le fondateur de cette philosophie naquit en 337, et mourut en 270 avant notre ère. Une fausse interprétation du très-court et obscur passage qui, dans la biographie d’Épicure par Diogène Laërce, concerne Métrodore de Stratonice, et l’application faite à Épicure de quelques mots qu’il faut appliquer à Carnéade, a entraîné plusieurs critiques et historiens à faire de Métrodore de Stratonice le contemporain d’Épicure. Mais, dans cette hypothèse, il faudrait aller jusqu’au bout et faire d’Épicure le contemporain de Carnéade. Or, les données les plus certaines de la chronologie s’opposent à ce qu’il en soit ainsi. C. M.

MICELI (Vincenzo) naquit à Monreale, en Sicile, en 1733. Sa vie s’écoula dans cette ville, dont il fut un des curés, et où il professa la philosophie et le droit au séminaire archiépiscopal. Il était depuis cinq ans préfet des études de ce séminaire, quand il mourut en 1781. Son enseignement avait eu un grand retentissement dans toute la Sicile, où il avait propagé le goût des études spéculatives. Des poëtes avaient chanté son système, auquel n’avaient pas manqué d’autre part les railleries des détracteurs de toute métaphysique et les objections plus redoutables d’une orthodoxie scrupuleuse. Soit modestie, soit timidité, il n’avait publié que des Institutions de droit naturel (Naples. 1776), en latin ; mais il laissait de nombreux manuscrits, dont un seul vit le jour au xviiie siècle : c’est une Introduction au droit canon (Ad canonicas institutiones isagoge scientifica dogmatica), qu’un de ses élèves fit imprimer un an après sa mort, avec une notice sur sa vie et un aperçu de ses doctrines métaphysiques et théologiques (Naples, 1782). Les écrits dans lesquels étaient déposées ces doctrines elles-mêmes ne se répandirent que par les copies qu’en prirent ou en laissèrent prendre ses élèves. Ils ont longtemps servi de base à l’enseignement de la philosophie et de la théologie dans une partie des écoles de Sicile. Ce n’est qu’en 1864 et 1865 qu’un professeur distingué de Palerme, M, di Giovanni, en a entrepris la publication partielle. Il a complété cette publication par des dialogues dans lesquels il introduit le maître lui-même exposant et justifiant son système devant quelques-uns de ses disciples, Giuseppe Zerbo. Saverio Guardi, Paolo Bruno, Ciro Terzo. Ce sont autant d’illustrations de l’école de Monreale , mais les ouvrages qu’ils ont laissés se