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Ce fut terrible.

                      Au choc, la troupe toute entière
― Chevaux et cavaliers ― roula dans la poussière,
Pêle-mêle, criant, hurlant, se débattant ;
Pendant que Sauriol lançait au même instant,
Par vingtaine, du haut de la crête saillante,
De lourds éclats de roc sur la masse grouillante.
Un double éclair aussi perce l’obscurité ;
C’est encor Sauriol qui, dans l’ombre posté,
Tire sur les Anglais et les crible à outrance.
Enfin, poussant trois fois le cri : Vive la France !
Le soldat, déserteur et héros à la fois,
D’un pas ferme gagna l’épaisseur des grands bois.

Ce fut pendant trois mois une chasse enragée.

Lorsque dans le sommeil la ville était plongée,
Un éclair tout à coup s’allumait quelque part,
Et mainte sentinelle, aux créneaux d’un rempart,
Victime sans merci d’une infernale adresse,
Tombait le front percé d’une balle traîtresse.
Parfois, si Montréal respirait, ― vis-à-vis,
Dans l’île où maintenant les soldats de Lévis
Voyaient flotter au vent l’étendard britannique, ―
Le poste anglais, saisi d’une terreur panique,