Page:Fournier - Souvenirs poétiques de l’école romantique, 1880.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
366
MAGU.


Il le faut, je suspends ma lyre
À la barre de mon métier ;
La raison succède au délire,
Je reviens à toi tout entier.

Quel plaisir l’étude nous donne !
Que ne puis-je suivre mes goûts !
Mes livres, je vous abandonne…
Le temps fuit trop vite avec vous.

Assis sur la tendre verdure,
Quand revient la belle saison,
J’aimerais chanter la nature…
Mais puis-je quitter ma prison ?

À l’astre qui fait tout renaître
Il faut que je renonce encor ;
Jamais à ma triste fenêtre
N’arrivent ses beaux rayons d’or.

Dans ce réduit profond et sombre,
Dans cet humide et froid caveau,
Je me résigne comme une ombre
Qui ne peut quitter son tombeau.

Qui m’y soutient ? C’est l’espérance,
C’est Dieu ; je crois en sa bonté :
Tout fier de mon indépendance,
J’y retrouve encor la gaîté…

Je me soumets à mon étoile.
Après l’orage, le beau temps !
Ces vers que j’écris sur ma toile
M’ont délassé quelques instants.

Mais vite reprenons l’ouvrage,
L’heure s’enfuit d’un vol léger ;